L’ENFANT N’INCARNERAIT-IL PAS L’HORREUR DE CE MONDE ?
par un (anormal) futur père, Bacolod City (Philippines), 19-21 Mai 2010

Complément temporaire
Pour une burka mixte ?
Introduction
  Dans le film « She’s having a baby » (elle est en train d’avoir un bébé), un jeune homme hurle de terreur-panique quand la femme qu’il aime lui annonce qu’elle est enceinte. Comme les autres spectateurs, j’ai autrefois souri devant cette scène cocasse, tout à fait à l’opposé de nos conventions, qui répètent unanimement que c’est le plus grand bonheur au monde. Mais… finalement, et puisque je vais devenir père, sans enthousiasme aucun, je me demande : pourquoi cette grande peur (possible) face à l’arrivée d’un bébé ?
  Je ne me souviens plu’ du contexte dans ce film : couple marié ou non. Quoi qu’il en soit, j’entrevoyais (à la réflexion) plusieurs explications à une réticence anti-bébé. Je vais les citer dans l’ordre « du moins satisfaisant à mes yeux au plus convainquant » :
A- Le petit ami veut librement changer de copine et ne pas être prisonnier d’une seule femme lui imposant la responsabilité de père (personnellement, je ne me sentais pas concerné par cette objection usuelle : en tant que monogame romantique et fidèle, je n’aime pas cet aspect bestial du mâle voulant couvrir de multiples femelles ; mais je savais que mon avis est très minoritaire dans les générations « pilule » devenues ado en 1968 et après, tout au moins parmi elles : dans le sous-groupe libéré des traditions judéo-chrétiennes.
B- Le jeune époux préfère une épouse toute entière tournée vers sa satisfaction à lui, plutôt que dispersée ou perdue en constantes attentions aux enfants (je le comprends, mais satisfaire l’autre pourrait contrebalancer, l’amour mâle n’est pas forcément qu’égoïsme : un amoureux peut aller aider sa belle partie sauver les mignons écureuils-pygmées, même s’il n’aime pas la vie en forêt tropicale et jalouse un peu ces animaux aimés).
C- Les cris nocturnes de nouveau-né, devant au départ être nourri toutes les deux heures peut-être, gênent le repos du père, non dispensé de travail diurne pour congé parental (c’est désagréable, fatigant peut-être, mais cela ne paraît guère pire qu’une piqûre vaccinale ou prise de sang médicale, douleur ponctuelle normalement acceptée par un adulte).
D- La relative douceur de vivre à deux peut disparaître pour laisser place à d’incessants cris parentaux disciplinaires et conflits entre générations, puis entre parents s’opposant sur l’action éducative adéquate, ruinant le paradis escompté d’un amour réciproque (effectivement, je plaidais coupable pour les soucis causés à mes propres parents).
  Mais en fait, le problème du bébé, de l’enfant, semble bien plus grave, et je regrette que la prétendue formation de l’esprit, scolaire, m’ayant (fourni la logique mathématique merci, mais) asséné pendant presque deux décennies des stupidités graves (respect de l’orthographe française avec amélioration interdite, amour du théâtre prétentieux, admiration des vers pompeux, etc.), soit passée totalement à côté du sujet familial, gravissime.
  Le déclic ? Une collègue (mère de famille divorcée ayant aimablement témoigné de ma « bonne qualité morale » pour le dossier d’adoption voulu par ma femme) m’a prêté récemment l’ouvrage « Points forts » du pédiatre américain T. Berry Brazelton, sous-titré « Les moments essentiels du développement de votre enfant. » Et, très judicieusement (merci a posteriori), elle m’a conseillé de tout lire depuis la première page pour en comprendre la logique (sans sauter au chapitre « bébé de onze mois » qui m’intéressait pour rencontrer avec douceur mon neveu asiatique, futur-fils). Je vais noter les éléments majeurs que je tire de cet ouvrage théoriquement rassurant, mais qui s’est avéré pour moi terriblement effrayant. J’en retiens surtout quatre points, renommés à ma façon :
1- Bébé monstre : si le bébé ne se sent pas entièrement satisfait, souvent il hurle ; que cela soit insupportable à son environnement est précisément le but escompté : obliger autrui à tout faire pour choyer le petit dictateur.
2- Bébé adulé : les mères vivent une profonde relation d’amour (spontané) vis à vis de leur bébé, acceptant n’importe quoi et pardonnant tout, pour le délice d’un sourire parfois en retour ; quand le bébé commence sa très classique crise d’opposition (seconde année d’existence), le charme initial disparaît, d’où vœu de nouvel enfant – désir culpabilisé, en tâchant de continuer à aimer le premier né comme il se doit.
3- Bébé dirigé : les parents communiquent normalement aux enfants leurs valeurs, comme le très obligatoire respect envers la propriété d’autrui (et les indispensables Réalité et Vérité) ; les parents visent toujours la réussite de leur enfant et souhaitent dès le départ qu’il soit meilleur que les autres ; ils ne doivent par contre pas intervenir dans les relations entre frères et sœurs, afin de laisser s’établir de normales relations dominant-dominé, valant apprentissage des relations sociales.
4- Bébé perdu : les parents (en Occident moderne) sont soumis à la dure concurrence de la télévision qui hypnotise l’enfant et lui fait avaler passivement d’autres valeurs que les leurs (qui visaient son propre bien) ; si cette influence est restreinte par les parents, le petit enfant grandissant – jouant cruellement du chantage affectif – dénoncera (injustement) cette privation comme punition méchante, « non-aimante ».
  Ces quatre éléments graves, en partie découverts dans ce livre (de 47 chapitres et 600 pages), me semblent maintenant expliquer toute l’horreur de ce monde, ruinant sa beauté potentielle (et son effective splendeur imaginaire).

1- Bébé monstre.
  Si le bébé ne se sent pas entièrement satisfait (et jusqu’à acquisition de la parole : sans expliciter ses attentes ou exigences), il peut hurler à la mort envers le moindre désagrément. Je pense qu’il ne s’agit pas de méchanceté, mais d’un très automatique apprentissage par l’expérience : avant même d’imaginer une logique ou souffrance en autrui, il s’avère que hurler apporte le réconfort. Donc, le bébé hurle pour obtenir réconfort, très très simplement. Et si ça ne marche pas parfaitement : en hurlant encore plus fort, durablement, ça finit par marcher. D’où répétition spontanée de cette habitude, recette qui marche bien (comme boire immédiatement quand on a un peu soif). C’est je crois de la bestialité pure, et de bas étage (plutôt au niveau de l’amibe que de la sociabilité fourmi ou chien).
  Théoriquement, il suffirait de ne pas donner prise à ce mode d’apprentissage, en résistant à l’appel des pleurs, avant de susciter – après maturation mentale – le respect d’autrui. Mais non : la position maternelle semble pousser à céder entièrement aux exigences hurlées (avec francs reproches au père s’il ne fait pas pareil en cas d’absence maternelle temporaire). Ce ne serait pas le bébé (immature, semi-légume) qui est le coupable en cela mais le bestial instinct maternel (faisant indirectement du mal ? en voulant faire en pratique du bien).
  Bien sûr, les discours usuels affirment tout le contraire : l’amour éperdu d’une mère envers son bébé serait le plus haut degré de l’Humanité, et noter que les chiennes et les vaches en font tout autant est « oublié » (ou « admiré comme presque humain »…). Bof, c’est du bla-bla rhétorique dénué de valeur persuasive. Certes, venir en aide aux bébés en souffrance est un beau sentiment altruiste, mais répondre pile au besoin faim-soif peut aujourd’hui se faire avec une horloge et un calendrier, de même : dissocier les cris de douleur (demandant aide médicale) et les cris d’exigence colérique serait possible avec un peu d’électronique (d’après la très complexe description, par Brazelton, des timbres et modulations distinctes) ; avec, par ailleurs, des tendres moments de jeu et câlin, gentiment offerts mais non exigeables par hurlements atroces. Je ne suis pas d’accord pour dire que la forme instinctive de réponse maternelle est plus admirable que la version assistée par l’intelligence. Une parodie genre « Le Meilleur des Mondes », d’Aldous Huxley (associant l’encadrement technique des bébés au moulage dans un semi-esclavage aristocratique) peut faire à tort condamner par amalgame, mais un débat contradictoire honnête devrait je crois viser le bien moral des enfants, pour leur éviter d’être conduits à se comporter en monstres d’exigence égoïste. (Certes, les complications techniques n’ont pas la côte, avec l’essor écologiste préférant la naturalité, mais celle-ci ne paraît pas une sagesse de principe, puisque ne sont pas exclues les anti-naturels chauffage, cuisson, agriculture).
  Toutefois, même si l’instinct maternel transforme les bébés innocents en (ce que j’appelle) monstres, j’ai conscience – comme le réexplique Brazelton – que c’est (généralement) temporaire, avant la compréhension « humaine » de l’altruisme, via la disparition de l’égocentrisme enfantin : bagarres accapareuses de jouets, entre enfants du même âge, avant conciliation amicale et prêts temporaires. Mais je vois là une autre profonde erreur : philosophiquement (pas du tout selon les verbeux philosophes professionnels mais selon la logique pure en matière philosophique), l’égocentrisme enfantin universel (« le Monde, c’est Moi » peut-être) est cassé à tort. Il s’agit d’un abus de pouvoir : affirmer avec haute autorité parentale que les personnages humains (et animaux domestiques) ressentent assurément de la douleur comme le moi. Cela est gobé bestialement avec carotte/bâton, récompense/punition, en interdisant de soulever la pertinente objection des personnages rêvés ou cauchemardés (nullement reconnaissables sur le moment). Je l’ai personnellement démontré – même si c’est en Occident passible de condamnation et punition psychiatriques ou carcérales (façon stalinienne) – après ma crise de 15 ans : le caractère effectivement pensant et ressentant d’autrui est totalement invérifiable, ce n’est qu’une grille de lecture assez simple, parfois (ou toujours ?) erronée. Même des électrodes cérébrales ne prouveraient rien, tel graphique scientifiquement clamé démonstratif (de non-rêve) étant observable en rêve sur mon personnage imaginaire (ou n’importe quel autre personnage). Point-clé parant les fausses accusations débiles (des « intellectuels » occidentaux, rédacteurs ou promoteurs des dictatoriaux « Droits de l’Homme ») : le partage, l’empathie et l’amour n’ont aucun besoin du caractère effectivement pensant d’autrui ; on peut pleurer de compassion et tendresse, sincères, devant un dessin animé (à la grande surprise des dessinateurs de Walt Disney, stupéfaits des larmes même adultes à la projection de leur premier long métrage : Blanche Neige), un enfant peut offrir ses jouets préférés à une fleur « gentille ». C’est logiquement, honnêtement, imparable, jusqu’à plus ample informé, et mon livre (impubliable) de 1993 à ce sujet n’a reçu en 18 ans (comme en N millénaires auparavant) aucune réponse honnête – que la mienne, expliquant l’horreur et l’apparente bêtise ambiante par un inavoué plan géopolitique, couronné de succès dans la violence et le mensonge. Par contre, comme je le disais dans ce livre, il serait splendide de faire germer (dans l’esprit enfantin, finalement, selon la logique de personnages cohérents) la légitimité intrinsèque de la morale altruiste. Cette morale est plaisante en elle-même (y compris dans un film ou rêve) : je préfère le personnage gentil (envers tous les autres dont moi) au personnage méchant (envers tous les autres dont moi), et cela me donne envie d’être gentil, sans autre raison que de me trouver estimable, tendant à susciter sourire-sympathie plutôt qu’hostilité-violence. Pour faire apprécier cet altruisme, nul besoin de promesses religieuses (égoïstes en prétendant le contraire) invérifiables, ni de projet politique trucidant l’opposition argumentée, c’est une simple affaire de goût, de beauté ressentie. Ce n’est pas forcé au sens d’exigence logique imparable, c’est un choix, assez plaisant, voire admirable (assurant l’harmonie non-violente si par chance il était général – ce qu’il n’est hélas pas). Faire ce choix serait le summum de l’Humanité selon moi.
  Mais non, la direction suivie (en Occident, tout au moins, crachant sur deux sagesses indiennes anti-réalistes) est absolument opposée : après avoir été dressés à se comporter en monstres, les enfants sont dressés à gober comme incontestablement vraies des affirmations douteuses invérifiables (caractère pensant d’autrui, vie post mortem ou contenu intemporel des théories scientistes, inexistence du Moi avant la naissance récente, etc.). J’y vois une franche mutilation de l’intelligence, une tromperie générale, écrasant à tort le doute sceptique. D’où ensuite l’investissement total de la parole dans le mensonge organisé (politique, géopolitique, religieux, scientifique, « intellectuel », psychiatrique, etc.). C’est notre monde là autour, pleinement monstrueux. Le sourire échangé entre une mère et son bébé vaut-il ce prix ? ces milliers de lucidités écrasées psychiatriquement, ces millions d’innocents expulsés ou explosés ou écrasés sous des roues de train ? Hein, je mélange tout ? Je ne crois pas, non : intelligence logique et sens moral (accessibles à tous, je pense – naïvement peut-être) peuvent générer une Humanité admirable, ce monde est tout le contraire, la racine me semblant la fabrication d’enfant-monstre et le ré-aiguillage partiel (autoritaire) sur de faux arguments, bases d’un système pourri. Je vais m’expliquer.
  [Pour ne pas être que négatif, je rappelle quand même mon utopie d’éducation imaginaire, voulue respectueuse (après avoir clos le livre de Brazelton) : nourrir et soigner les bébés sans céder à leurs hurlements d’ennui ou volonté, les dorloter souvent mais pas en réponse à des cris exigeants de leur part, puis peu à peu (et plus tard) les encourager à percevoir le bonheur de l’altruisme (matériellement frugal mais) adoucissant les relations (même dans les films ou rêves), encore plus tard leur faire comprendre l’abus de pouvoir des menteurs laveurs de cerveau.]

2- Bébé adulé
  Je comprends très bien ce qu’est l’amour envers un doux petit être idéal, merveilleux. A mon sens, l’amour absolu (magnifique, admirable) est le vœu protecteur d’un jeune homme innocent envers une petite jeune fille illettrée (ayant peut-être inventé bien mieux pour écrire-lire que les idioties imposées en pays francophones et anglophones), méprisée, brimée injustement, triste anémique malade (et peut-être classée handicapée, mentale et physique), stérile. Et j’escompte un sentiment réciproque, de sa part à elle, remerciant de cette générosité par des sourires et une forme de complicité chaleureuse. Avec miracle du cercle vertueux de l’amour : plus elle l’aime, plus il l’aime, et plus il l’aime, plus elle l’aime, etc. Puisque l’existence d’autrui ne me paraît pas assurée, cela constitue pour moi la pleine et entière définition de l’amour. (Même entre être imaginaires – là n’est pas le problème : double zéro aux prétendus philosophes, occidentaux). (Et forniquer comme des bêtes, puis enfanter comme des bêtes, n’a à mon sens aucun rapport avec l’Amour, si beau et pur sentiment – je désapprouve que le langage entendu pratique un amalgame inutile ou malhonnête, comme avec les mots Moi, Juif, etc.).
  Toutefois, si la jeune fille aimée s’avère un monstre d’exigences égoïstes, rendant plusieurs fois par jour la vie (de son amoureux) insupportable pour aucune autre raison que des caprices sans borne, cela sape les bases de cet amour naissant, automatiquement. S’il est trop tard, et que le cœur trompé a déjà chaviré, les actes d’agression sonore ou verbale transforment la passion amoureuse en douleur profonde, pardonnant peut-être tout mais avec un sentiment de piège injuste, atroce. Ce qui ne rejoindrait pas du tout la prétendue beauté absolue de l’amour filial.
  A priori, je vois la naissance de l’amour comme l’attachement à un être perçu comme merveilleux parmi tant d’autres moins plaisants. On est ému par un regard échangé, un sourire répété, et on l’apprécie, de plus en plus, et on se retrouve amoureux. Le « coup de foudre » me paraît bien sûr aussi envisageable, mais seulement par grande ressemblance entre un visage précis rencontré et un idéal imaginaire antérieur – qui plus est, ce coup de foudre se vit je crois au départ sous forme « gros gros faible, à confirmer ». Par contre, qu’une mère à qui on présente une masse de chair fripée hurlante sans regard, en disant « c’est votre bébé », tombe aussitôt et pour toujours amoureuse : je ne comprends tout simplement pas. Désolé. Ce n’est même pas que l’amour féminin admiratif que j’imaginais est un malentendu, seul se formant l’amour que je croyais masculin qui signifie vœu de protection, non : c’est ici automatique « sans raison » (un bébé ressemble à un autre bébé, et les services hospitaliers peuvent se tromper d’étiquetage filial, sans diminuer le phénomène d’adoption « amoureuse »). L’amour maternel me paraît un insondable mystère, peut-être un réflexe instinctif, bestial, nullement justifié par la réflexion ni la sensibilité – cela expliquerait pourquoi les bouddhistes considèrent qu’être (humain mais) femme ne permet pas d’atteindre le détachement absolu, la sagesse.
  Cet amour étrange, souvent clairement injustifié, transparaît quand les informations mentionnent des enfants gravement battus et même des infanticides : quelques parents, mères même, ne supportent plu’ les hurlements enfantins d’exigence infinie, bien illustrés par les odieuses petites furies de la série-reportage Super-Nanny (restaurant « l’autorité » semi-militairement) – avec condamnation unanime de ces parents excédés, par les journalistes et autorités, sans l’ombre d’une analyse qui mettrait en question la source du problème. Il a aussi été signalé « l’horreur » d’une loi récente dans un état américain, les textes de loi locale y ayant été rédigés pour préférer l’abandon à l’avortement dit infanticide (ceci est un autre débat) : bon nombre de parents habitant loin viennent y abandonner légalement leurs enfants difficiles (« insupportables » selon eux).
  L’amour envers le bébé très imparfait est-il le summum de l’altruisme ? Je ne le crois nullement : aider un petit être dans le besoin serait tout autant accompli en élevant un bébé chien ou vache et plus encore un futur-kangourou immature en poche, sans devoir bénir les hurlements de bébé humain, sans devoir tenter de dompter les colères du jeune enfant. Qui plus est, l’enfant d’autrui serait aussi estimable que le sien, et parfois (ou souvent) plus charmant. Sans l’incompréhensible automatisme filial, cet amour parental paraît injustifiable – et si on me rétorque que l’amour est aveugle, je l’admets mais je ne perçois pas l’émotion inhérente à cet amour là, ne s’appliquant pas à une personne trouvée merveilleuse-séduisante, mais à une pré-personne parachutée, quoi qu’elle fasse lors de la rencontre ou après. C’est peut-être d’ailleurs un phénomène d’appropriation, le bébé n’étant pas assimilé à un être autonome respectable mais à un objet (longtemps désiré sous forme imaginaire puis) possédé, adoré jalousement, temporairement.
  Le bébé est-il perçu comme une poupée, un jouet ? Ce ne serait pas forcément une spécificité féminine (qui serait mystérieuse pour moi) : selon mes souvenirs de petit garçon, j’adorais infiniment mon nounours brun, avec des câlins très longs et très tendres (vécus comme réciproques, pleinement, idylliques – tandis que mon grand frère hyper-jaloux, adoré par mes parents, symbolisait pour moi la cruauté abjecte). Mais cette hypothèse jouet ne colle pas : si ce nounours m’avait hurlé aux oreilles, pour changer de bras ou autre caprice, je l’aurais bien sûr abandonné pour lui préférer un oreiller et donc un nounours imaginaire. Enfin… l’abandon d’enfant humain me paraît coupable, car celui-ci peut dire à ses parents : « j’ai pas demandé à vivre, vous m’y avez forcé, alors vous devez le payer maintenant », mais il paraît juste que ce soit donnant-donnant (et gagnant-gagnant) : pour mériter l’amour, il faut se montrer aimable, ne pas faire souffrir sciemment – sous peine de retour de bâton. Enfin, c’est là mon avis naïf, moral au sens propre – la valeur dominante est certes tout le contraire, égoïste, j’ai ainsi appris à l’école publique française que quand la France attaquait les autres pays, c’était pour la paix et le bien de chacun, mais quand la France était attaquée, il s’agissait d’un viol inadmissible. Et le racisme est déclaré inadmissible mais « qu’un sang impur abreuve nos sillons » redevient un chant obligatoire, sacré. Et la condamnation judaïque des mariages mixtes (menaçant le pur-sang supérieur) reste totalement exemptée d’accusation de racisme, sous peine de se faire traiter soi-même de raciste antisémite, condamnation « intellectuelle » et judiciaire à l’appui. Quel monde pourri… Les bébés monstres deviennent grands, sans rien comprendre aux injustices qui génèrent la violence. Ne pourrait-on pas réfléchir (en ôtant les tabous) avant de perpétuer ces mécanismes horribles ?
  C’est bien la préférence envers ses propres enfants (même capricieux et sur-exigeants), aux détriments des autres enfants (ou autres adultes) qui semble le principe politique de ce monde. Cet esprit de famille s’étend à la communauté, ou à la nation, générant le rejet ou l’exploitation de l’étranger, en se sentant vertueux car on ne le fait pas (que) pour soi-même mais pour ses enfants (aussi). Faussement sous la bannière de l’humanisme chrétien, les aristocrates ont ainsi asservi les masses pour assurer oisiveté et luxe à leurs seules familles (endogames), puis les colonisateurs républicains ont asservi les indigènes pour assurer la richesse des bien-nés, puis les bourgeois ont méprisé les manuels pour assurer confort sans effort à leurs enfants pistonnés. Faussement sous la bannière démocratique, les Occidentaux se sont appropriés les droits de veto onusiens en brimant la majorité du monde, pour rendre Israël aux prétendus enfants des Hébreux mais surtout pas les USA aux enfants des Amérindiens, d’où haine terroriste contre ce racisme outrancier, racisme occidental menaçant d’extermination civile massive les foules en désaccord (l’atome militaire étant légalement réservé aux bien-nés – avec totale approbation des « sommités intellectuelles » bénissant l’amour filial…). Je suis profondément choqué : cet « amour » là ne me paraît nullement estimable.
  Ce que je dis de l’amour filial pourrait certes, partiellement, s’appliquer à l’amour envers une jeune fille, puisque l’amoureux aveugle (et vulnérable) choisit une personne indépendamment de son mérite objectif, mais l’énorme différence me semble être qu’il s’agit là d’un amour non raciste. (Je précise que – compte tenu des détails de ma naissance affective à 14-15 ans – je ne conçois a priori l’amour qu’entre un né-français malgré lui et une jeune fille d’origine asiatique ou polonaise). L’amour filial, lui, favorise semi-égoïstement les porteurs de mes gênes aux dépens des autres, classés méprisables de naissance. Quoique… pourquoi sacraliser ainsi la question du racisme, qui n’est qu’une injustice parmi d’autres ? D’accord, toute préférence subjective et sentimentale s’avère partiellement injuste, mais je ne perçois pas comment elle peut s’appliquer à des ingrats colériques. Je ne vois nulle beauté dans cet amour là, désolé. J’ai l’expérience semi-fatale d’un amour erroné, sans retour ni mérite sentimental (jugement après guérison, 20 ans après), mais il n’était pas spontané (étant né de nombreux sourires et regards échangés, interprétés comme immense amour en face), et il s’agit d’une erreur grave, infiniment triste, ce qui ne paraît nullement admirable, incontestable, et encore moins justificatif de brimades envers autrui innocent.
  Bien sûr, je suis moi-même ingrat d’avoir profité de l’amour parental reçu sans l’approuver maintenant, mais ni plus ni moins que je suis ingrat d’avoir bénéficié du niveau de vie occidental (d’où statut « prince charmant » vu d’Asie) tout en souhaitant maintenant l’abrogation de ce privilège (monétaire). Il ne s’agit nullement de dire égoïstement « c’est bien si j’en profite, c’est mal si ça me coûte » mais au contraire : « je regrette d’en avoir profité, sans comprendre, à l’époque ». A mon avis, un individu né-aristocrate qui aurait souhaité l’abrogation des privilèges en 1750 aurait fait preuve de la double qualité d’intelligence et sensibilité : logique pure et cohérence morale, ce qui aurait pu éviter la guillotine en retour. A mon avis (d’origine juive paraît-il), un né-juif qui aurait souhaité l’abrogation du racisme israélite (pour revenir à un judaïsme prosélyte antique) en 1900 aurait pareillement été juste et bon, pouvant éviter la Shoah en retour. L’accusation d’ingratitude est souvent manœuvrière, et mérite de se voir répondre : « vous avez apparemment pensé m’acheter (avec votre ’’amour’’ spécial), et je me suis laissé guider avant de grandir, maintenant j’ouvre les yeux et je dis ’’pardon, stop : que l’amour récompense les actes, comportements, caractères, non la naissance ici ou là, dans telle ou telle famille’’ ». C’est révolutionnaire, hélas, et même si le Christ et Marx ont déjà pu le suggérer, leurs paroles ont été détournées, pour le triomphe du favoritisme familial ou communautaire ou national.
  Bref : oui, l’amour bestial envers le bébé me semble atroce, en ceci qu’il constitue (apparemment) la source de presque toutes les injustices humaines.

3- Bébé dirigé
  La transmission de valeurs (religieuses ou morales) aux enfants semble viser deux buts distincts, mais j’y vois une partielle contradiction :
– amener l’enfant à devenir un adulte « bon », avec des principes estimables implantés tôt, faisant référence morale
– amener l’enfant à bien s’intégrer dans la société, à son avantage matériel, avec satisfaction, de manière paisible
  Le problème présent (et passé ?) vient du fait que la société est très injuste, alors l’éducation doit-elle conduire à vouloir changer en mieux ou bien à tout accepter en cherchant à se trouver du côté profiteur ? Autrement dit : la révolution anti-aristocrate de 1789, ou la révolte anti-esclavagiste à Haïti plus tard, constituent-elles des résultats d’éducations réussies (le bon vaut mieux que le confort de certains) ou bien ratées (le confort paisible de certains vaut mieux que le bon) ? En France, on dirait peut-être « éducation de gauche » ou « éducation de droite » (la gauche socialo-communiste, comme la théologie de la libération, n’existant pas au pays de Brazelton). Et la tendance semble que les adolescents sont utopistes/idéalistes de gauche, avant de devenir des adultes mûrs, installés, de droite. Pour y réfléchir, je vais faire comme ce que nous a demandé la psychologue (française) chargée d’avaliser notre adoption : « que voulez-vous reproduire de l’éducation que vous-mêmes avez reçue ? que voulez-vous faire différemment ? » d’où (à tête reposée, après avoir officiellement répondu les banalités adéquates) étape d’introspection, souvenirs personnels (même si je m’effacerai sans doute au bout du compte, laissant ma femme imposer une éducation catholique de droite).
  Je remercie mes parents pour certaines de leurs valeurs transmises (agnosticisme notamment, base partielle de mon scepticisme, et logique compréhensible de 1789, base partielle de mon sens politique), je ne partage pas pour autant leurs valeurs sur d’autres points. Ainsi les valeurs que citent Brazelton comme indispensables (et conformes à mon éducation) me paraissent maintenant immorales.
• Le respect absolu de la propriété me paraît contestable. La très grande propriété par héritage ou par gain au jeu (loto, commerce, spéculation, etc.), ou par goût envers les postes de commandement, ne me paraît nullement méritoire et que celle-ci soit protégée par la police et la « justice » me paraît profondément injuste. Je n’appelle personne à la révolution meurtrière, en ce qui me concerne : il convient de respecter la loi du plus fort, armé, mais ça ne justifie pas d’en faire une valeur morale. De même le commerce et la logique marketing (vendre le plus cher possible acceptable, pour faire un maximum de bénéfice) ne recevront pas mon appui. Quand l’enfant (avec argent de poche ?) voudra s’acheter, ou voler, un disque, je dirais peut-être (si c’était moi qui en décidait, sans ne faire qu’appuyer mon épouse dans une autre direction) : « ce chanteur a cinq villas tapissées d’or inutile, et il exige ce prix très élevé pour avoir droit à ses chansons, c’est dégueulasse ; puisqu’il est à l’aise matériellement, il devrait partager ce qu’il fait de bien ; mais voler un disque, sans payer ceux qui ont extrait-transformé les matériaux dont il est fait, ceux qui ont assuré la fabrication-transport-distribution, c’est dégueulasse aussi ; alors : paye et dis-toi seulement que ces chanteurs, imprésarios, et beaucoup de commerçants, sont des fumiers égoïstes, riches aux dépens d’autrui ». Le travail pénible, le rendement de production, l’invention utile ou plaisante, me paraissent seuls mériter supplément de revenus (sans excès outranciers). Cette récompense, limitée, évite la faillite communiste, venue de l’égalitarisme salarial suscitant paresse et refus de travail (à l’image des fonctionnaires français – eux relativement riches en ponctionnant socialistement le secteur privé sous menace policière et judiciaire). Je ne vois pas pourquoi un enfant de pauvres devrait « moralement » respecter la possession injuste d’un enfant de riches gâté-pourri, exhibant de manière indécente ses avantages indus ; il vaut mieux estimer que c’est une laide victime d’intoxication parentale, ne devant pas susciter l’envie mais plutôt la désapprobation non-violente. Certes si les pauvres voudraient prendre la place des riches pour faire jalousement pareil (point de vue très majoritaire aux USA et aux Philippines, penser aussi aux colons esclavagistes ayant remplacé les aristocrates locaux), le respect « altruiste » du riche dominant se comprendrait, mais je trouve cette tendance (anti-1789) : bestiale (loup dominant, loups dominés), génératrice de rancœur inutile, injustice éternelle, violence occasionnelle. A mon avis, il vaudrait mieux partager entre tous les bébés, chacun pouvant alors s’attacher à son bout personnel de propriété privée. Plus avant en âge, quand la propriété personnelle récompenserait une tâche pénible ou une invention plaisante, ce surcroît de mérite justifierait effectivement le respect. Cela n’a rien à voir avec le système capitaliste de fortunes héritées, ou issues de ruinage des concurrents, sous-paiement des fournisseurs et employés, sur-facturation des clients trompés par le lavage de cerveau publicitaire et le mensonge pseudo-scientifique (dont j’ai la preuve mathématico-logique hélas répétée mais chut : secret professionnel). Cela n’a rien à voir, non plus, avec le système socialiste de favorisation des fonctionnaires, syndicalistes, politiciens, refuseurs de travail, grévistes sans risque, compatriotes. Cela n’a rien à voir enfin avec le système communiste de favorisation des apparatchiks et leaders. Quant à l’anarchie, je ne sais pas bien ce que c’est : je crains que, sans ordre, on n’en revienne à la bestiale loi du plus fort. Bref, la justice ne semble pas au catalogue politique, et je n’emmènerai pas mon jeune fils à une fête de parti. Je ne pourrais lui apprendre qu’à soupirer : l’inégalité imméritée ne justifie aucun respect, à mon avis, même s’il semble préférable de se soumettre et tendre l’autre joue (en rêvant que les méchants triomphants ici-bas soient punis post-mortem, par exemple, comme les esclavagistes « chrétiens » d’autrefois, n’ayant rien voulu comprendre à la morale du bon Jésus peut-être – celui du "bon Samaritain").
• Quant à la valeur de Réalité, je répète que je ne suis nullement d’accord. Philosophiquement, cela ne tient pas la route, et l’inculquer relève de la tromperie abrutissante, du lavage de cerveau. (Cela répond certes à une demande enfantine, pour minimiser la très jeune horreur des cauchemars et des monstres nocturnes, mais en cassant à tort la future consolation adolescente par la rêverie).
• Le principe de vérité, par opposition au mensonge, me paraît davantage intéressant, mais cet apprentissage de l’honnêteté paraît complexe dans la mesure où le monde alentours fonde, avec succès, ses valeurs sur la rhétorique mensongère, prétendant au bien altruiste pour cacher le mal égoïste actif (voir ce que je disais plus haut sur christianisme, judaïsme, capitalisme libéral, démocratie, etc. – ce à quoi j’ajouterais la perversité des biomathématiques « simplifiées » en entreprise pour valider à tort, en méprisant les lucidités non diplômées, et en achetant sans doute les experts officiels s’ils ne sont pas complètement nuls). Est-on plus heureux en restant aveugle ou en remarquant toutes les saloperies ambiantes ?
• La « ’’valeur’’ trouvée à surpasser les autres » me gêne aussi, terriblement, a posteriori (même si j’admire l’inventeur ayant résolu un problème paraissant insoluble, et faisant gratuitement don de la solution à l’Humanité). Il paraît que j’étais un enfant adorant les jeux, de cartes puis d’échecs, où je gagnais très souvent, sous les applaudissements amusés de mes parents. Je regrette ce côté joueur que j’ai totalement perdu et ne reconnais donc pas vraiment « mien », et il me semble y avoir eu une erreur d’aiguillage. Gagner n’était certes pas chez moi « faire perdre l’autre » (ou « s’amuser à faire pleurer les plus petits », à la façon de mon grand frère en sport et autres), non, il s’agissait d’atteindre autant que possible la perfection personnelle… mais il aurait été souhaitable je crois qu’on me fasse observer que le perdant était triste, alors qu’il n’avait montré aucune méchanceté à punir, donc le blesser ainsi n’était pas joli. Comme je l’ai fait plus tard avec ma toute petite sœur, j’aurais dû laisser les autres gagner souvent, si je maîtrisais le jeu. J’illustrerai l’erreur d’aiguillage par un exemple double : ma passion enfantine initiale était le dessin, via d’abord de grandes fresques imaginaires avec des cow-boys méchants (incarnant mon frère) et Indiens gentils (incarnant la victime injustement brimée : moi-même), puis en découvrant les bandes dessinées, je me suis mis à ne plu’ faire que des copies, effectivement adorables, applaudies mais tarissant mes ressources intérieures. En vacances, mes parents m’ont inscrit à un concours de dessin, quand j’avais peut-être sept ans, et j’ai gagné le premier prix (des 7-10 ans ?) sous les hourras familiaux. Je me suis senti un peu gêné : le jury avait visiblement cru que c’était génialement inventé alors que c’était une copie d’un dessin humoristique animalier de Gotlib, ma victoire était presque mensongère volée (ce qui aurait pu, je crois, me conduire à la politique républicaine…). A l’opposé totalement, un ami de mes parents, Jean-Louis, m’a discrètement promis un billet de cinquante francs (chouette, pour m’acheter des bandes dessinées) si j’écrivais et illustrais une bande dessinée de mon invention, d’une page pour commencer. J’ai essayé, mais abandonné, et pourtant là était la bonne direction j’en suis sûr maintenant : constatant mes insuffisances à représenter ce qu’il y avait dans ma tête (histoires d’une petite Indienne d’Amérique, orpheline martyrisée), j’aurais dû aller à des cours de dessin anthropique, ou au moins chercher à m’améliorer encore et encore dans cet élan représentatif. Adolescent, j’ai regretté infiniment d’être incapable de dessiner à l’infini le visage de celle que j’aimais, avec des couchers de soleil ou bien nuages de pluie… La « victoire externe » douteuse n’était pas ma voie, et je n’ai pas su saisir ma chance de m’orienter à temps vers le rêve intérieur (je n’ai jamais revu Jean-Louis). Toutefois, je ne suis qu’un cas particulier, et j’ignore ce qui conviendra à mon futur-fils.
• La « domination » est un sujet difficile. Certes, le (contraire) repli rêveur paisible est clairement rare – même l’extinction bouddhiste a dérivé vers la théocratie tibétaine. L’idée de domination semble, elle, très populaire, surtout via la guerre et le sport, captivant peut-être (quelque chose comme) 90% des humains, 98% des garçons. Personnellement, j’ai été élevé dans le but de (continuer à) faire monter l’ascenseur social vers « L’Elite » du mérite scolaire (« il n’y a qu’une place de bonne, celle de numéro Un »), j’ai longuement réussi à me maintenir au sommet avant de m’effondrer, choqué, dérouté, à 15 ans : en préférant la toute douce dernière de la classe, en détresse, à la brute insensible que j’étais devenu, rejeté évidemment. Il aurait mieux fallu faire réfléchir avant, au lieu de foncer tête baissée pour obtenir des avantages matériels. Avec logique et sensibilité, je crois que tout peut être construit, tandis que… se soûler d’ambition et micro-victoires, surtout en contexte « intellectuel » de valorisation arbitraire des meilleurs réciteurs aveugles (hors mathématiques ?), me paraît regrettable, dangereux. Cela a failli être mortel dans mon cas. Mauvais calcul, à tort au nom de la générosité, des « valeurs » prétendues bonnes et justes. Triompher dans l’écrasement d’autrui, par enfants interposés, me paraît opposé à la morale altruiste, à l’amour envers le faible. Enfin… vu la faillite des communistes ayant dissuadé la performance, je préciserai que me paraît très aimable le faible travailleur, honnête performant voire inventif, ici méprisé pour son absence d’ambition socioprofessionnelle. Chez Brazelton et ses premiers lecteurs, c’était peut-être surtout une vision protestante (les riches familles d’Amérique seraient les élus de Dieu, nouveaux Juifs du Monde, les familles pauvres seraient méprisables), mais les autres cultures semblent suivre au moins partiellement la même voie écraseuse (hiérarchie catholique, guide suprême de la révolution prolétarienne patriotique, chef de tribu). Cela me semble rendre insoluble le problème de violence en ce monde, rendre ridicules les prétentions à la justice équitable.
• Approuver « l’écrasement du petit frère » (ou petite sœur), par la force, me paraît aussi très contestable, moche. Indépendamment de l’idéal naïf de justice théorique, cela peut générer des malentendus graves entre générations. Ayant été un second enfant brimé par l’aîné hyper-jaloux, sans intervention de mes parents, je n’ai pas fait du chantage affectif extraverti (« hé ! si vous n’intervenez pas, c’est que vous ne m’aimez pas ! »), mais, version introvertie, j’ai silencieusement conclu que mes parents étaient des « méchants » refusant de me comprendre (confirmant leur sévérité alimentaire m’obligeant à avaler des choses immondes, à mon goût, sans droit à répondre « rien, merci »). Je n’ai donc nullement imaginé de leur exposer mes problèmes de cœur adolescent ou jeune adulte, suicidaire en repli total. Mauvais calcul, dont n’a même pas idée Brazelton, apparemment dépourvu d’esprit autocritique. Si je n’ai qu’un enfant unique, cette question ne sera toutefois pas mon problème de père. J’ai lu ailleurs que, selon la tradition germanique, l’aîné hérite de toute la richesse parentale, donc les suivants doivent se faire une place en dominant les membres d’autres familles. Je ne suis pas d’accord avec ce système d’écrasement et préfère l’égalité des chances, la légère rétribution de la performance, légère pénalisation du refus de travail pour autrui (sauf autarcie), la confiscation des héritages par l’institution désintéressée assurant école et hôpital pour tous – mais je veux dire « tous sur la planète », détail qui rend cette idée altruiste non représentée aux élections, pas même envisagée. Faute de débat contradictoire entendu à ce sujet, je ne suis pas certain de la pertinence de mon point de vue, et cela rend difficile la transmission ferme de « valeurs ». Seul repère presque solide : il ne me semble pas généreux de vouloir conforter (ou élever) ses enfants en position de dominants (position non généreuse et qui attire sur eux haine et violence). Enfin, quelqu’un peut certes prétendre n’importe quoi, mais ça ne me convint nullement. Je ne reçois hélas pratiquement jamais d’argumentaire pointant mes erreurs ou arbitraires contestables, si ce n’est de ma (semi-jésuesque) copine imaginaire, qui comme moi n’aime pas les enfants turbulents (normaux), ce qui ne m’avance guère pour le sujet ici abordé.
• Autre point délicat où mes valeurs sont bancales : notre caractère carnivore, tuant paraît-il, pour notre plaisir gustatif, des animaux mignons (chiens en Corée avec colère des Européens, chevaux en France avec colère des Britanniques, vaches un peu partout avec colère des Indiens, etc.). Je ne suis pas végétarien (et tuer des plantes, où certains animistes voient une sensibilité, serait aussi contestable), mais j’ai un peu mauvaise conscience. Je n’ai pas un avis clair et net transmissible avec conviction – j’aurais tendance à dire à l’enfant que porc, bœuf, veau, poulet, au supermarché n’ont aucun rapport avec des animaux, mais lapin et poisson son des mots non particuliers à l’alimentation, et mentir avancerait à quoi ? J’admets que mes arrière-petits-enfants éventuels pourraient parfaitement, si les valeurs évoluent vers davantage d’altruisme, me traiter à ce sujet de monstre immonde comme je le fais vis à vis des personnages de mes ancêtres peut-être esclavagistes. Ceci ramène au point de départ : faut-il des enfants essayant d’être bons moralement ou bien des enfants favorisés matériellement ? Je ne sais pas : le mieux semble qu’eux-mêmes en décident plus tard, en leur fournissant seulement les éléments du choix. Je préfère en tout cas susciter l’intelligence qu’inculquer l’obéissance aveugle, pré-militaire – l’autorité devrait se mériter. (Mais pour ce type de relation, il ne faut pas s’être engoncé dans le piège d’avoir créé un bébé-monstre, préférant réclamer que réfléchir.)

4- Bébé perdu
  La télévision me paraissant, en Occident moderne, un outil de propagande outrancière, je trouve atroce qu’elle soit exigée par les enfants, exerçant un chantage affectif pour l’obtenir (« hé ! m’en priver, c’est me blesser, pas m’aimer ! »). Je vois de multiples monstruosités dans le message télévisé, martelées comme évidences incontestables :
• La légitimité morale de la domination américano-sioniste (ultraraciste, en fait, mais chut…)
• La grandeur admirable des forces armées régulières et leurs perfectionnements pour tuer
• La légitimité des armes de destruction massive, dans notre camp exclusivement
• L’innocence des électeurs dirigeant les diplomates et armées
• L’innocence des enfants occidentaux et la culpabilité des enfants à Dresde, Hiroshima, Sodome
• La légitimité du consumérisme effréné et des exigences envers l’inutile mode/standing/luxe
• L’approbation de riches campagnes publicitaires dans un monde où des paysans meurent de faim
• La légitimité de l’enrichissement personnel sans mérite au service d’autrui
• La grandeur de l’écrasement (du faible), sportif en particulier
• La légitimité de l’anti-humanisme groupiste (judaïque/tribal ou régional/national/continental)
• La pleine innocence de la séduction tous azimuts suivie du rejet de presque tous
• La grande joie des aventures sexuelles multiples et le caractère ridicule de l’abstinence
• L’impossibilité d’éradiquer les maladies sexuellement transmises autrement que par la recherche
• La vertu de l’aumône périodique rachetant tous les excès égoïstes
• La nécessité de l’extraversion, de l’ambition personnelle aux dépens d’autrui
• La grandeur de la Culture dite générale, la supériorité des érudits se disant « les intellectuels »
• L’objectivité de la Science ou la grandeur de la Genèse biblique
• Le caractère intéressant des célébrités (et de leurs enfants-stars)
• Le caractère indiscutable de l’Histoire officielle, le caractère criminel du doute non-violent
• Le caractère universel des Droits de l’Homme (condamnant le bouddhisme indien sans argument)
• La supériorité de la forme (cravate, titre officiel, paraître) sur le fond (contenu, arguments)
• Le caractère incontestable de la liberté religieuse (en oubliant religions nazie et apartheidienne)
  Si l’enfant exige cette télévision-drogue, toxique pour les neurones et flattant les pires instincts égoïstes (en versions personnelle et groupiste), s’il préfère foncer tête baissée dans tous les pièges, gober tous les mensonges, je trouverais cela blessant vis à vis de mes invitations à réfléchir. Cela confirmerait que ce n’est nullement un être adorable mais un petit monstre bestial, grandi.

  En conclusion, je ne me sens pas vraiment prêt à devenir père de famille. Je ne comprends aucunement le féminin désir d’ « enfant quel qu’il soit ». Hélas, hors personnage imaginaire, il s’agit là semble-t-il d’un trait de caractère féminin quasi systématique, et – par devoir envers ma femme – j’essaierai donc d’être un père satisfaisant, tolérant les horreurs du petit, aidant celui-ci à surpasser les plus gentils (qui peuvent mériter davantage que lui), présentant comme requises les valeurs sociales avec lesquelles je suis en total désaccord, sans signaler les horreurs qui me choquent. Si j’étais pleinement cohérent, je serais seul, ou je serais mort (si ma mort est possible, sans simple changement de monde).
  Si le monde présent n’est pas un rêve et que j’ai été moi aussi enfant, j’en conclus que l’on m’a mal éduqué : on ne m’a pas fait réfléchir à temps, on m’a embrigadé pour une mauvaise course, qui n’aurait donné satisfaction que si j’avais été normal (normalement bestial dominateur). A quel âge conviendra-t-il d’inciter mon futur fils à ouvrir les yeux ? Je ne sais pas, je laisserai sans doute faire sa mère, bien davantage impliquée dans cette affaire d’adoption, d’éducation voulue occidentale. En tout cas, partager ma lucidité douloureuse ne serait pas un cadeau. Quoique, en cas de suicide du petit, je regretterai peut-être, trop tard. Pas facile.

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Complément temporaire juste avant la Crise du Non, 13/08/2011
  Le bébé, bientôt adopté (malgré le frein terrible des « autorités »), a maintenant 2 ans, parle une langue étrangère (austronésienne ?) que je connais peu. On risque de me redemander (collègues, famille française) : « alors ça s’est bien passé avec lui, cette année ? ». Je crois que… les conventions sociales m’interdisent de dire « non », voire « bof », mais répondre « oui » serait mentir, le plus adéquat me semblerait : « c’est très compliqué » :
--- Ce qui me gêne est l’amour familial requis inconditionnel. Pour illustrer le problème de principe : j’ai entendu dire qu’autrefois, ou en pays ultra-islamiste, ce sont les parents de 50 ans qui décident qui leur fils de 20 ans épouse, et s’il a une autre préférence personnelle, c’est insulté comme « égoïste », « ingrat » vis à vis de la famille, valeur sacrée. Cet « amour sur commande » me choque, me paraît impossible ou très difficile. A cela s’ajoute la spécificité de l’amour parental dont j’ai parlé l’an passé – je reprends l’analyse autrement, sur un plan d’affinités qui s’est avéré critique je crois : dans un groupe type scolaire, de 30 enfants (15 garçons 15 filles), par expérience je pense que j’aurais de la sympathie pour environ 6 d’entre eux (4 filles et 2 garçons, rares « humains tortues » dans ma terminologie à moi) : ceux qui ont un tempérament qui me touche, m’attendrit – timides, effacés, réservés, dominés soumis tristes, rêveurs, victimes de la persécution scolaire contre l’introversion (cf. notes de « participation orale », musique-récitation-théâtre-sport obligatoires, condamnation de la timidité, …), non compétiteurs. Mais si on me dit que tel fougueux hurleur est mon enfant donc que c’est lui que je dois aimer et favoriser contre les autres, je suis immensément gêné, personnellement (si j’avais le choix : je ne serais pas d’accord, hélas je n’ai pas le choix…). Je sais que je suis anormal en cela, « individualiste » en ayant été dégoûté par l’endoctrinement groupiste subi (asséné par l’école et les médias, surtout – merci à mes parents de n’avoir pas poussé sur ce plan) : s’il y a 300 candidates Miss Monde, je voterais pour celles que je trouve jolies et je me contrefiche de laquelle est LA française, « proche » de moi en parenté ou quoi (et si j’entends la Française chanter fièrement « qu’un sang impur abreuve nos sillons », elle me dégoûterait même). Pourtant le monde marche tribalement, de la « tribu familiale » à la « tribu occidentale » : injustice en faveur de ses enfants (principe aristocrate dit scandaleux en 1789… pour faire pareil finalement, hélas), ou en faveur de sa ville, sa région, sa communauté ethnique, sa patrie, son continent. Je ne suis pas du tout d’accord avec ce principe : je préfère le respect de chacun avec préférence pour les individus à comportement attachant quelle que soit leur statut de naissance.
--- Je comprends qu’on peut dire « chacun a le droit à l’amour d’une mère » (ou « d’un père »), mais j’aurais dit à Maman-Hitler « vous aimez un monstre, vous êtes bestialement aveugle bouchée comme une maman de singe égorgeur de bébés singes, c’est pas votre faute, mais humainement il mérite pas d’amour ». Certes, sans l’amour parental, on pourrait craindre que seuls les forts gagneurs (à l’américaine) seraient aimés, les faibles étant mal-aimés, mais certains comme moi aiment surtout les faibles, quand d’autres comme mon frère et mon père aiment surtout les forts ; en tout cas, je ne ressens pas la légitimité de l’amour décrété obligatoire à cause de la filiation. Certes, autrefois avant la contraception, on s’amusait et ça faisait naître des enfants qui n’avaient rien demandé, et il était normal d’assumer en tâchant de réduire leur inconfort de vivre, mais ce mécanisme est tout à fait hors-sujet en Occident moderne (sous contraceptif) ou pour notre adoption volontaire de type « simple » (non pleinière) : cet enfant avait déjà des parents, et je ne vois pas ce que j’ai à payer pour la « faute » qu’il vive (et souffre, ce qui est synonyme selon les bouddhistes, que je comprends sur ce point). [Euh, si on me dit que tel petit enfant souffre, ça m'attendrit c'est vrai, mais qu'est-ce qui fait souffrir cet enfant là non malade ni triste ? la réponse vécue m'a semblée claire : il souffre qu'on ne lui obéisse pas entièrement ou pas assez vite, ce qui le conduit à hurler sa colère ce qui fait un peu mal à la gorge et fait tousser parfois, désagréablement... non, l'enfant-tyran qui souffre de pouvoirs insuffisants ne m'émeut pas, je préférerais lui conseiller de changer pour la paix gentille entre lui et nous.]
--- Je voudrais dire à l’enfant : « pour être aimé, il faut commencer par se montrer aimable. Rien n’est acquis automatiquement par hurlement d’exigence, accaparant les parents qui seraient obligés de satisfaire toutes les demandes. C’est en générant au contraire sympathie et tendresse qu’on obtient réconfort mérité (théoriquement) ». Je ne le dirai en fait pas, car ma femme n’est visiblement pas d’accord et c’est elle qui a voulu cet enfant, que je n’ai fait qu’accepter, en tâchant de répondre à la demande, étant en retrait. Par ailleurs, pour une adoption simple, ce serait hélas un drame que de moins obéir à l’enfant, qui criera alors sa colère « je préfère les autres parents ! », catastrophe (au sens : « j’aurais trahi la demande de mon épouse »)… Si les hurlements ne cessent pas, un jour il faudra avoir recours à la force (d’écrasement disciplinaire, paternel ? hélas…) ou la menace imaginaire terrifiante (attaque de monstres invisibles – ma femme a déjà commencé dans cette voie, via ombres ou esprits, pas encore religion). Dommage de ne pas plutôt susciter l’intelligent respect, sans cet « amour » aveugle excessif qui impose d’autres excès pour recadrer le monstre produit… Certes, ça explique le monde, mais c’est moche : ça explique la mocheté de ce monde.
--- Le fait que je n’aime pas les enfants « normaux » (m’apparaissant comme monstres bestiaux plutôt qu’anges de pureté) n’exclut pas que ce soit un simple « mauvais moment à passer, avant assagissement raisonnable avec l’âge ». D’accord. Ce n’est pas impossible voire ça paraît probable, mais c’est temporairement très désagréable, triste, vécu comme injuste.
--- Je sais qu’on me répondra : « il faut bien des enfants pour assurer tes vieux jours ! ». Je ne suis pas d’accord. Le monde est en surpopulation chronique : l’apport de la médecine efficace moderne (autorisée sans plus être condamnée à mort par ceux qui commandaient la prière), sans réduction des naissances, a fait exploser la population mondiale, avec épuisement des ressources, en pétrole déjà. Si trois quarts des humains n’avaient pas d’enfant, la population redescendrait simplement (sans tuer personne) de 7 milliards actuels aux 2 milliards de 1925 puis 0,2 milliard estimés de l’an 400 – sauf diktat religieux (moralement irrecevable**), l’important est que chacun se sente bien, il n’y a nul besoin moral de population gigantesque. Certes des économistes escrocs (plus que diplômés : professeurs « de l’enseignement supérieur », « experts ») prétendent qu’il faut croissance perpétuelle (gaspillage croissant indéfiniment ?) pour assurer le confort, mais ils ne font que généraliser à tort leur recette de profit spéculatif à court-terme (conduisant droit dans le mur à long terme) sans envisager les alternatives. En dessous de 0,2 milliard d’humains sur Terre, on pourrait continuer à descendre (vers les 0,0005 milliard estimés en l’an moins 100 mille : voir tableau à http://fr.wikipedia.org/wiki/Population_mondiale), et/ou stabiliser, mais ce dernier mouvement ne requiert pas 2 enfants obligatoires par couple : quelques passionnés d’enfants peuvent avoir 10 enfants par couple quand les normaux non-intéressés en auraient zéro – généraliser aveuglément est un tort (en logique et en morale). Toutefois : si le désir d’enfant est un instinct féminin irrépressible, c’est moi qui aurais tort (d’envisager son absence en certaines), pour ce monde-ci, j’en conviens, et ça confirmerait que j’aurais dû rester seul, dans le monde des rêves. Erreur d’aiguillage. Que cette école a donc été terriblement stupide de prétendre me rendre lucide (à la dure avec millions d’inutiles apprentissages par cœur, avec carottes et bâtons), me former l’esprit pendant tant d’années sans me donner les éléments essentiels de jugement… [** : je précise que le diktat religieux est prétendu celui d’un Tout-Puissant Dieu « d’amour » ayant condamné à mort ses enfants nés immortels mais ayant osé vouloir comprendre sans obéir aveuglément, ayant condamné à la même mort tous les enfants nés depuis au nom de culpabilité « héritée » à la naissance, ayant exterminé par le Déluge presque tous les bébés et embryons-reprogrammables… Je trouve que Le vénérer est pire que le néo-nazisme ou néo-stalinisme, mais je n’ai pas le droit de le dire à haute voix : Jésus-Christ a très explicitement appelé ses disciples à tuer les parents qui éloigneraient leurs enfants de Dieu… c’est comme ça que le Christianisme terroriste et son Dieu raciste judaïque ont conquis le monde… et cette religion est non seulement légale mais bénie par tous les prétendus « intellectuels » occidentaux, ayant fait interdire le débat contradictoire à ce sujet, classé antisémite… La morale altruiste me semble ailleurs – certes pas dans le stalinisme-maoisme faisant un peu pareil sans Dieu, ni l’Islam faisant pareil avec d’autres modalités, mais Mère Thérésa et l’Abbé Pierre auraient été bien inspirés de s’expliquer en mettant 90% de Jésus à la poubelle de l’immonde antique périmé].
--- Je comprends qu'une des fonctions parentales, un des bonheurs parentaux potentiels, consiste à bien éduquer l'enfant, à le rendre estimable même s'il avait un éventuel fond spontané : difficile ou choquant. Toutefois, quand mon enfant parlera ma langue, comprendra mes propos tout au moins, je ne crois pas que je devrai essayer de lui faire aimer mes valeurs, de non-hurlement oral en particulier. Tant il semble que le monde marche ainsi, et puisque mon épouse ne veut pas du tout pour cet enfant la frugalité tranquille mais la réussite luxueuse, elle est mille fois plus à même que moi de trouver les recettes qui marchent : mentir (commerçants, « intellectuels » occidentaux, scientistes, professeurs propagandistes), hurler (voir de l’antisémitisme nazi partout, manifester en beuglant au nom de la justice sociale pour obtenir des privilèges aucunement extensibles à toute l’humanité travailleuse), écraser autrui (pour prendre les places voulues surpayées), etc. L’école française, cette usine à crétins (qui m’a hautement décoré et je le regrette – j’étais en dépression sous psychotropes peu lucide, peu responsable), pourra en cela « bien » le former, d’accord. Et ma femme assurera la formation religieuse. L’intelligence et le cœur me semblent ailleurs, mais dans une voie suicidaire que je ne souhaite pas à autrui (sauf personnages imaginaires de rêveries).
--- Objection en relisant les lignes plus haut : je suis très contestable a priori en préférant un enfant triste complexé à un enfant criant sa joie et sa domination, mais je peux expliquer ma logique : une personne triste complexée a besoin d’être consolée, revalorisée, et j'approuve un bonheur (mâle ou paternel) à apporter ce soutien bienveillant ; une personne hurlante de gaieté et autosatisfaction ne me choque pas, elle n’a simplement pas besoin de moi, et la voir pérorer ne m’inspire aucune tendresse. Certes, l’idéal selon cette "logique" serait que la triste ou l’enfant triste, réconforté(e), soit « un peu solidifié(e) » mais reste fragile, à soutenir, car une métamorphose en jouisseur exubérant gâcherait tout (comme le prince charmant qui tombe amoureux fou d’une humble bergère timide peut être immensément attristé de la voir devenir princesse tyrannique hurlant de rire – mon oncle docteur a épousé une bergère éblouie par lui… puis il a divorcé quelques années plus tard, peut-être quand elle est devenue à son tour fière bourgeoise)… Je crois que je ne dois pas être égoïste, et je suis d’accord pour que le petit enfant (formé à l’ambition par sa mère) s’éclate en victoires écraseuses sur les faibles, peu importe ma tristesse à moi, snif (ou plus exactement : ça confirme que, même si je pourrais aimer un enfant mien, pauvre, au contraire ce gagneur-ci ne suscitera pas vraiment d’amour en moi). Je précise que le paradoxe n’est pas totalement absurde : je ne préférerais pas un enfant handicapé mental profond, hurlant comme un nouveau né jusqu’à l’âge de 30 ans, j’aurais simplement de la compassion envers le silencieux regard triste d’un enfant bègue boiteux, dernier de la classe pour avoir inventé mieux que la « maîtresse » (diplômée en récitation non-critique). Certes, on ne choisit pas ses enfants, je le comprends, mais ma position n'est pas simple puisque je ne suis pas convaincu par les dogmes "il faut des enfants" et "je dois préférer mon enfant normalement méchant au rare enfant gentil d'autrui".
--- Un des « problèmes » (à mon goût) comportementaux de mon futur fils est son extrême jalousie, écrasant les cousins plus petits que lui et frappant ses grands frères pour prendre leur place sur les genoux d’adultes par exemple. Je n’aime pas ça, non (et j’ai essayé de répéter le prénom de son frère qui lui quémandait poliment une chips dont il tenait le paquet en refusant d’en donner à autrui – j’ai applaudi quand il a donné finalement la 8e chips en finissant de mâcher la 7e – même si ce bravo l’a laissé totalement indifférent, au lieu du sourire que génèrait les applaudissements pour construction/démontage de jouets)… Quand il deviendra notre enfant (unique) ce problème-là disparaîtra, pour se reproduire peut-être en crèche ou à l’école… Personnellement, (j’aurais préféré être enfant unique, et) je n’aimais pas la jalousie dominatrice écrasante de mon grand frère, et voyant en fratrie mon futur-fils j’aurais été touché que le petit soit dans cette position, à protéger et soutenir plutôt qu’à contenir dans sa violence accaparatrice… Euh, attention sur le principe : je me rappelle avoir demandé – à mon frère qui était hyper-jaloux enfant – pourquoi il n’était pas pareillement devenu adulte jaloux de ses enfants, et sa réponse (très logique, en un sens) a été : « mes enfants, c’est moi » (égoïsme groupiste auto-caricaturé ?), or je suis conscient d’être un peu similaire (pas seulement à cause de ma philosophie égocentrique) dans ma préférence envers un enfant-tortue qui serait « comme moi ». Mais ce n’est pas du narcissisme chez moi : je me trouve laid et déséquilibré, je n’étais pas assez tortue à mon goût actuel (je cherchais à être premier de la classe, j’aimais gagner au jeu d’échecs ou cartes), et mon cœur préfère nettement une fille tortue à un garçon tortue.
--- Mon approche de la paternité n’est pas influencée je crois par le contexte d’adoption plutôt que paternité biologique : s’il s’agissait du fils « de mon sang » et que la loterie héréditaire lui avait donné le comportement de mon grand frère écraseur, j’aurais exactement la même difficulté (que pour un enfant adopté) à trouver cela aimable. C’est peut-être différent pour la maternité, les ouvrages sur l’adoption expliquant que les mères adoptives ont grand peine à justifier leur amour sans avoir porté cet enfant dans leur ventre, comme si cette gestation utérine expliquait ou justifiait un immense amour en soi, ce que j’entends sans comprendre (je vois l’embryon comme une sorte de ténia plutôt, se nourrissant en parasite, solidement accroché – en dépit du vœu d’avortement « naturel » de nombreuses mères involontaires, autrefois ou dans certains pays).
--- Donc, à la question « ça s’est bien passé, avec le petit ? » ou « avec le petit, ça colle ? », je ne répondrai pas un « Oui » menteur, ni un « Joker ! » qui ferait froncer les sourcils avec suspicion, je pense que le mot adéquat est « ça va », sous-entendu : « ça semble aller pour lui, moi ça va pas trop mais je survivrai, pardon, être père (avec un enfant de ce caractère très fort) doit être accepté, même si ça me semble assez déplaisant, pardon ».
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Interdit de douter, 21/08/2011
  Dans un bulletin de liaison de Enfance et Familles d'adoption, une "clinicienne" canadienne écrit "La maltraitance passive (quand on laisse les enfants pleurer, qu'on ne leur donne pas d'affection) fait autant de mal que la maltraitance active (les coups)". Ce jugement (que je lis comme "il est criminel de résister aux hurlements d'exigence ou colère enfantins") m'est balancé à la figure sans argument, c'est consternant. S'il est officiel chez les psychologues et médecins, alors les parents semblent avoir le devoir légal de créer un enfant tyran, qu'il faudra ensuite réprimer par la force. C'est lamentable, pourquoi ne pas réfléchir, débattre, avant ?
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Une approche "bestiale chrétienne" peut-être, 29/10/2011
  (Au risque de me répéter en partie, je refais un point.) Si je suis choqué par les caprices hurleurs de mon fils adopté, nullement désapprouvés par ma femme et ma belle-famille philippine (désapprouvant seulement mon attitude désobéissant aux exigences infinies de l’enfant), je dois reconnaître que ses frères et cousins étaient pareillement insupportables à 1-2-3 ans, avant de devenir doux comme des agneaux vers 4 ans, calmes effacés, ne rendant même pas les coups assénés par les plus jeunes. Ceci ne ressemble pas à ce que j’ai connu en France, avec des enfants doux soumis et des enfants durs écraseurs, à 2 ans comme à 6 ans. Mais pour le comprendre, j’ai repensé à deux points : 1/ le fait que pour adopter aux Philippines, j’ai dû jurer être « religieusement apte » à éduquer mon enfant, en portant serment sur la Bible (ce que j’ai fait comme j’aurais dit devant une caméra islamiste, un révolver braqué sur la jambe : « Allah est grand, Jésus est petit, Darwin est stupide, je l'affirme de mon plein gré, je le jure sur le Coran Sacré Béni, inch'Allah »)… 2/ Quand ma femme m’a rencontré, elle a été très étonnée, me demandant « mais comment fais-tu pour être gentil comme ça ? puisque tu ne crains pas Dieu, si tu ne crois pas en Dieu ». Donc, apparemment, les enfants philippins sont des petits monstres d’égoïsme en pleine liberté, jusque vers trois ans et demi, puis on leur scie les jambes par la terreur religieuse (le Délugeur-bombardeur exterminateur, le Tortureur de l’Au-Delà), qui les rend doux, dominés, dressés animalement, comme des petits chiens vénérant leur Maître. J’espère que ma femme, émigrée loin de ses Philippines, sans hiérarchie catholique locale en phase avec ce projet éducatif là, parviendra ainsi à adoucir l’enfant. Je crains que ça se passe mal (au nom de la « liberté de l’enfant » chez nous, les donneurs de leçons ignorant que, pour être cohérent sur cette voie, il aurait fallu éviter de créer un bébé monstre, puis le convaincre tôt de la logique intrinsèque de l'altruisme – plus tard, adepte du tac au tac argumentaire, l'enfant pourra me mettre le nez dans le caca : "si tu mets des exigences à m'aimer, papa/tataï, je préfére les autres parents, mon vrai papang qui acceptait tout de moi, tu m'as volé salaud !")… On verra... je suis simplement inquiet, très inquiet.
  Avant de jurer au tribunal mon aptitude religieuse, j’ai lu intégralement les 4 Evangiles officiels catholiques, et j’ai été très choqué. Jésus a explicitement appelé (ses disciples) à tuer les « parents éloignant leurs enfants de Dieu », le meurtre étant pardonnable pour les croyants, seule l’offense à Dieu étant un crime impardonnable, puni aussi de torture éternelle sans demande de pardon recevable… Alors oui, les conquérants chrétiens ont conquis le Monde et rendu le Christianisme religion dominante sur la planète – nullement par pouvoir de conviction, mais par embrigadement des enfants et meurtre des parents le refusant… Pas un mot de cela à la télévision (propagande stupide) ou dans mon éducation laïque (alliée au monde chrétien), et contester ces horreurs semble même passible des tribunaux français (pour crime d’antisémitisme, la Bible étant un tonitruant manifeste pro-Juif – il est formellement interdit de conclure que c’est un texte sacré ultra-raciste appelant au meurtre alors je ne le dis pas)… Et il s’avère impossible de discuter avec mon oncle converti catholique (après éducation athée), toute analyse critique suscitant de sa part des hurlements outragés, des bordées d’injures sans argument aucun… Tant qu’il reste des papiers encore non signés, pour l’adoption, je conclus : « Dieu est grand, Manitou est petit, Bouddha est stupide : signez s’il vous plaît, ma femme veut cet enfant, je veux le bonheur de ma femme ». La vie est belle ? Je préférais mes rêves, désolé.
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Arrivée de l’enfant, 20/04/2012
Ça y est, l’enfant est arrivé (il y a 15 jours), et tout le monde nous souhaite un immense bonheur. Je ne comprends pas ces mots, ce n’est pas du tout vécu ainsi. Enfin, je fais part à ma famille de chaque sourire-émerveillé de l'enfant, un peu touchant (les livres dépliants, ma crème pâtissière appréciée, etc.), mais en conclure que je fonds de tendresse est un total malentendu :
– Caprices : comme je l’avais entrevu depuis deux ans, cet enfant a été formaté à pleurer pour obtenir et il pleure « donc » obtient à peu près tout (refus de marcher, refus de poussette, pour être porté « à cou » à presque trois ans ; refus de lit séparé des parents, refus que sa mère adoptive s’éloigne ou soit ne serait-ce qu’à un autre étage à portée de voix ; refus de shampooing ou mouillage de tête quelle que soit la température ; exigence constante de partenaires de jeux à quatre pattes au sol ; refus d’écouter les appels à la prudence pour éviter les chutes et les bris de verre, etc.). Avec l’âge et l’expérience, il a enrichi son panel de pleurs : il hurle moins mais commence par gémir, si ça ne marche pas il pleure à haute voix, si ça ne marche pas il crie plus fort avec intonation de colère scandalisée, si ça ne marche pas il tousse et s’étouffe, ça marche à tous les coups. Si je résistais à cette comédie, les psys classeraient cela en maltraitance, c’était marqué noir sur blanc dans les textes de préparation à l’adoption. (Je précise qu’il n’y a aucun syndrome d’abandon : il ne réclame pas du tout ses parents biologiques, mais voudrait revoir sa tante et sa cousine, ses préférées personnes après sa mère adoptive, restée avec lui onze mois là-bas et acceptée après deux mois de refus paraît-il).
– Amour : ce petit monstre aurait pu être mon fils biologique, puisque il ressemble à mon frère aîné, que je détestais (je ne comprenais pas pourquoi "fraternité" signifie amitié), et dans une classe de 30 enfants, il ne ferait pas partie de mes trois amis préférés (silencieux introvertis) mais de mes trois pires ennemis (égoïstes envahissants). On déclare que c’est mon enfant et que je dois DONC l’aimer, je ne comprends pas pourquoi. J’aime ma femme qui l’aime, donc je fais des efforts pour l’accepter, céder à ses caprices, jouer avec lui en essayant de me baisser et me relever, mais m’en demander mille fois davantage me paraît impossible. Quand on aime, on peut tout tolérer, mais l’amour sincère (d’individu déplaisant au premier et second abords) ne se décrète pas, que je sache.
– Dictature : comme envisagé depuis deux ans maintenant, cet enfant a été dressé à devenir un enfant tyran – même si son fond de caractère y prêtait, ce n’est pas complètement sa faute. (L'enfant a adopté la mère lui cédant le plus, a rejeté la mère biologique un peu sévère pour son bien). Mes craintes lucides ont été balayées, et on me dit maintenant qu’il faut mater cet enfant rebelle, l’écraser par autorité paternelle (ne pas être qu’un « papa-gâteau »), ce qui est la forme de dictature qui me déplaît le plus. J’avais craint ce mécanisme m’obligeant à la violence (vocale), et, sans surprise hélas, j’avais raison. C’est très triste.
– Piège : le pire est que, si je ne suis pas un papa-copain, cet enfant en adoption simple hurlera qu’il préférait son autre famille, fera une crise, et il faudra payer très cher des « spécialistes » qui diront que l’autorité n’est pas la solution mais qu’il faut faire preuve d’amour. En se fichant éperdument que je n’aime pas un enfant colérique menteur. Je suis esclave, ça y est. La lucidité préventive n’aura servi à rien.
– Fausse solution : j’ai vu la série TV « Super-Nanny », et entendu que les enfants tyrans pouvaient être ramenés à la raison par une forme de contrat, de règles à bénéfice réciproque, imposées avec autorité, non par dictature mais en expliquant chaque point. Il y a trois écueils à cela : 1/ je ne parle pas la langue du petit et il n’entend donc pas mes explications ; la langue française ne l’intéresse pas, et il refuse l’effort de l’acquérir, davantage qu’un mot ou deux jusqu’ici ; puisque c’est lui qui décide, pourquoi cela changerait-il ? 2/ La série TV ne diffusait pas le cas d’enfant refusant les dites règles, et pleurant durablement pour échapper à leur mise en application, ne pas céder à ces pleurs étant classé maltraitance par les psys (escrocs). 3/ La mise en halte-garderie (après résolution des mille problèmes de paperasses) puis à l’école pourrait le sociabiliser mais s’il traite les autres enfants comme ses parents, cela fera un bagarreur colérique insupportable, et les maîtresses nous convoqueront pour dire que c’est aux parents eux-mêmes d’élever leur enfant, sans droit à le rendre asocial en le parachutant ensuite en classe, ingérable… d’où psys etc. Le piège s’est bien refermé.
– Espoir ? : l’attitude de la maman adoptive est évidemment la clé. Le dos brisé par le port des 18 kilos, elle a commencé à refuser le port du petit monstre, en criant plus fort que ses pleurs. En lui expliquant dans leur langue le pourquoi du comment. Une amélioration semble donc possible, mais ça ressemble à une guerre, pas forcément perdue, simplement très pénible. Non, le bonheur n’est pas au rendez-vous. Sans les hormones maternelles aveuglantes, j’étais lucide, c’est tout, je crois.
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Prise de recul un peu ?, 20/04/2012
Trois ans après, en recevant de l'association de parents adoptants une souscription pour un livre photo sur l'adoption, j'ai répondu par un courrier, peut-être à garder :
Bonjour Madame,
Bravo pour votre succès à trouver un éditeur, ce n’est pas du tout facile. Néanmoins, je ne détournerai pas 30 à 45 Euros de mon argent pour votre livre, en diminuant d’autant l’aide que j’envoie à la famille de mon fils adoptif (ma belle-famille en pays pauvre, mon fils adoptif étant mon neveu – à la façon du Pacifique : les parents avec beaucoup d’enfants en donnent aux couples ne pouvant pas en avoir).
Un livre super-pertinent sur l’origine de l’adoption m’intéresserait mais ce serait peut-être à moi de l’écrire, et il serait impubliable (et peu illustrable photographiquement). Je ferai ainsi plusieurs reproches à votre approche (des origines de l'adoption) :
1– Elle n’aborde pas la dictature administrative gouvernant l’adoption
2– Elle n’aborde pas la dictature maternelle en matière d’adoption
3– Elle n’aborde pas l’égoïsme d’adopté
4– Elle n’aborde pas l’incohérence raciste des gouvernements occidentaux en matière de natalité/adoption
Je détaille un peu, au cas où ça vous intéresse pour écrire un second livre à vous :
1/ Nous avons essuyé d’abord un refus, d’autorisation administrative (requise légalement pour adopter). C’est l’association des parents adoptants qui nous a dit ce qu’il fallait faire : ne jamais répondre sincèrement aux psychologues et assistantes sociales chargées de ces questions, mais dire ce qu’elles veulent entendre. Car elles ont le pouvoir de nuire et s’en servent pleinement, et c’est légal, pas classé « abus de pouvoir » (exactement comme en matière de justice, de police, etc.). Et c’est évidemment payé par nos impôts, réquisitionnés sous menace policière, judiciaire, carcérale (la logique est la même, anti-populace). Mais vu de l’extérieur, c’est une honte absolue. Toutefois, en mentant affreusement, nous avons finalement obtenu l’agrément officiel d’adoption (même si les juges ont longtemps refusé d'accepter cette adoption pas 100% à-la-française, en nous tenant pour coupables, d'avoir en fait obéi à des fonctionnaires incompétents et je-m'en-foutistes). Mais comment enseigner à notre enfant qu’il ne faut pas mentir, alors (puisque c’est ce qui marche, c’est ce qui fait marcher le monde) ?
2/ Dans les associations de parents adoptants, il y a surtout des femmes, parfois accompagnées de leurs maris s’ennuyant péniblement mais faisant de gros efforts. L’irrésistible envie d’enfant semble féminine, et la plupart des maris y consentent pour éviter le divorce. Une de mes collègues a ainsi divorcé "d'un sale manipulateur", en réalisant semble-t-il que « viens, on va faire un bébé » était un jeu de mots (mensonger ?) pour jouir du sexe, sans aucun vœu masculin de parentalité, de mômes hurleurs, chieurs, capricieux, en colère, etc. Pour les hommes stériles ou impuissants tolérés, consentir à l’adoption peut être un sauvetage in extremis (avant divorce/suicide), plutôt qu'une joie ou un projet positif. Mais cela détruit le projet de tendre vie à deux, romantique, et c’est une souffrance, possible.
3/ Une collègue adoptée de Corée me l’a confirmé après que je l’ai constaté avec mon fils adoptif : même s'ils ont oublié leur "vie d'avant", les enfants adoptés s'en servent stratégiquement pour obtenir des privilèges. Enfin, comme les enfants naturels jouent des divergences entre père et mère, pour obtenir le plus possible (de jouets, loisirs, etc.), ils jouent des divergences entre parents naturels et occupants pour culpabiliser les adoptants et obtenir davantage. « Je préfère les autres parents », « d’abord tu es pas mon père », etc. Les enfants sont des égoïstes féroces, pas des bisounours. Ils ne sont certes pas des objets, et il est normal qu’ils résistent et demandent, mais ce n’est pas tout rose du tout. La supercherie freudienne s’est dissoute mais la culpabilisation des parents (naturels ou adoptants) va dans un sens très contestable, au profit d’enfants rois qui tendent à devenir caractériels en exigences infinies. L’apprentissage de l’altruisme (« ne crie pas pour ne pas te faire crier dessus pareillement ») est classé maltraitance par les psychologues, tous idiots semble-t-il, c’est particulièrement criant pour les familles adoptantes, officiellement suspectes, exigées parfaites, pas seulement normales.
4/ La loi française (et pareil dans les autres pays dits riches) vise à freiner l’adoption internationale, empêcher la venue de « bougnouls », même voulus par les familles d’ici. Prétendument, c’est pour empêcher tel cas de père pédophile et d’enfants volés, même si c’est 0,03% des cas, et une usine à gaz vertigineuse se met en place grâce à cet alibi. Plus généralement, la loi est xénophobe, encourageant fiscalement les bébés nés ici et entravant l’adoption, transformée en parcours du combattant en dissuadant la majorité des candidats, naïfs (avec refus fréquent ou obligation d’adopter des poly-handicapés lourds). Ce rejet des étrangers est absurde : les prétendus experts économistes, avec leur dogme de la croissance (éternelle), oublient simplement qu’il suffit d’ouvrir les frontières pour que la dénatalité occidentale disparaisse, compensée plus que largement par l’immigration de travailleurs voulant tenter leur chance en pays riche. Non, les frontières sont militairement closes, et atomiquement avec armes de destruction massive anti-civils, en disant crotte au Traité exigeant l’abrogation de cela (traité répété avec violence, mais exclusivement à l’égard des « sales bougnouls », pas de nous-mêmes oh sacrilège...). L’adoption internationale, qui fissure ce mur étanche, dérange, et est donc combattue à ce titre, sans le dire bien sûr, mais c’est pratiqué au seul nom de la Loi (en fait loi pourrie, imposée par les ministères en refusant le référendum d’initiative populaire qui donnerait démocratiquement le pouvoir à la population contre ces dominants ultra-minoritaires). Pire encore : la richesse occidentale est venue historiquement de l’envahissement du monde par nos canons (avant de faire fructifier ce capital), en exterminant les autochtones refusant cette immigration (Amérindiens, Aborigènes, etc.), il serait donc éthique que nous prenions équitablement un retour de bâton dans la figure : l’immigration des autres venant maintenant nous envahir à son tour (et sans nous exterminer par les armes, on a même de la chance). Certes, les candidats adoptants dans nos pays ne présenteraient plus aucun attrait si nous perdions notre richesse volée, mais ce serait juste. Bref, l’adoption internationale est malade : elle est combattue par des gens absurdes (comme les autorités françaises), xénophobes sans le dire, et voulue par des gens absurdes (comme moi), oubliant qu’elle n’a de sens qu’en aval de géopolitique injuste brimant la majorité du monde.
Tout cela rend très pessimiste, ou aigri. Et, en tant que père, il faut faire semblant d’avoir les épaules solides quand même, mais des soupirs profonds sont compréhensibles.