Agnosepticisme : une doctrine à moi
Par D.Molirr, 05/10/2018

(dernier ajout)
1/ Dieu ou pas
   Discutant par mail avec un ami, il me disait « Dieu ou pas, il faut choisir », et je contestais ceci en disant qu’il y a une troisième voie, neutre : l’agnosticisme (peut-être Dieu ou bien peut-être pas de Dieu, mystère), là me semblant la sagesse. Selon lui, ce n’était pas la définition d’agnosticisme, qui serait plutôt une croyance en Dieu mais Le considérant inconnu, pas décrit par les prétendus textes sacrés (a privatif et gnose = connaissance). Il semble que la définition du dictionnaire me donne raison, ce qu’il désignait lui étant plutôt le déisme (comme celui des francs-maçons français vénérant le mystérieux « grand architecte de l’Univers » ?). Mais j’ai trouvé une fiche philosophique de la collection Philo Facile (éditions Atlas) consacré à l’agnosticisme, et c’est intéressant. Son titre sous forme de question est « peut-on vivre sans croyance ? ». Le Oui dit que la certitude évite la croyance, le non affirme que la croyance est inévitable. Cela me semble une erreur d’analyse, et j’ai bien plus majeur à exposer sur ce sujet.
   Dans le détail du développement, il est dit pour le Oui que la croyance est trompeuse quand la science (quoique modeste et prudente) est bien plus certaine ; se préoccuper de choses inconnaissables serait inutile. C’est là oublier qu’un sceptique peut douter de la science comme des croyances, et inversement : c’est oublier qu’un illuminé par la foi prétend à la certitude et aucunement à la croyance.
   Pour le Non, il est dit que croire en la Science ou la raison est aussi une simple croyance (j’ajouterais : il faut choisir de refuser l’hypothèse du rêve présent, arbitrairement, pour que la science ait un sens). Croire ne croire en rien serait aussi une croyance, est-il dit (mais c’est un mauvais procès : sans scepticisme dogmatique prétendant au vrai, on peut vivre le doute apparent comme apparemment sage, apparemment toujours). Enfin, il est prétendu que croire rassure l’homme et donne un sens à la vie, évitant le suicide (je ne vois pas le rapport, ayant vécu le suicide comme une euthanasie cessant la souffrance aiguë tout au contraire de conclusion d’un sentiment de vide). Par ailleurs je doute du prétendu sens donné par les religieux, commandant de multiplier bestialement et de vénérer un tyran caractériel narcissique (hypothétique).
   La Conclusion affirme que les croyances religieuses ont reculé devant les avancées de la science, mais qu’une croyance de fond demeure, en la science par exemple. Et que les croyances aident à vivre, vivre sans croyance étant impossible. Je ne suis pas d’accord, je vis (ou vivote fragilement) sans croyance.

2/ Expérience ou pas
   Autrefois, je pensais être agnostique : pas croyant religieux du tout, mais pas farouchement athée non plu’, plutôt sur une position « je ne sais pas ». Mais quand j’ai découvert une définition d’agnosticisme disant « ne croyant que ce qu’il voit », j’ai eu le sentiment de ne pas être représenté par ce terme. En effet, ma position est aussi « je ne sais pas » en ce qui concerne la réalité du monde présent (qui pourrait tout autant être mon rêve, pour ce que j’en sais). Finalement, je serais donc plutôt sceptique qu’agnostique – quoique sur la question de Dieu, les deux notions soient confondues.
   Internet/Wikipedia m’a donné une autre définition d’agnostique : « L’agnosticisme est une conception selon laquelle l'esprit humain ne peut accéder à l'absolu. Selon les agnostiques, il est impossible de trancher le débat sur l'existence d'un dieu ou d'une divinité. Il n'y a aucune preuve définitive sur le sujet, et il n'est pas possible de se prononcer ». Cela ne parle pas de l’expérience, mais la fiche Philo Facile donne encore une autre définition : « Attitude consistant à considérer que tout ce qui dépasse l’expérience est inconnaissable (mais pas forcément inexistant) ». L’agnosticisme ainsi défini ne serait donc pas l’incroyance totale mais la croyance en l’expérience seule. Le véritable agnosticisme, en revenant à l’étymologie, serait donc le scepticisme, doutant de tout. Je suis donc sceptique, ce qui semble une forme extrême d’agnosticisme, je l’appellerai agnosepticisme. Cela signifierait « sceptique, ce qui rejoint la position agnostique sur la question religieuse ».

3/ Bilan
   Avec des tableaux, c’est peut-être plus clair :

-------- Ajout 07/07/2019 : « non-fondement »
   Je réponds à un ami : Dans ton rejet du scepticisme, tu dis qu’on ne peut rien fonder sur le scepticisme, et je ne sais pas quoi dire. On ne peut rien « fonder » sur la sagesse ? sur la tranquillité bouddhiste ? Certes, ce n’est pas le socle pour un activisme forcené, mais ça me parait une ouverture d’esprit lumineuse, mon idéal à moi et celui que j’aurais aimé que l’école m’apporte (au lieu de faire tout le contraire). Je prendrai un exemple, si ce n’est pas clair : la Bible/Genèse dit que la Terre est au service des hommes, devant l’asservir, et sur ces paroles se fondent les chantiers de bulldozers ruinant les forêts et déplaçant les montagnes ; en face, des tribus amérindiennes disaient qu’il faut vénérer avec respect absolu mère nature, sans rien faire ni abimer, et ça laisserait l’humanité au temps des cavernes (en zone tropicale à moustiques, seule habitable puisque brûler quoi que ce soit pour chauffer artificiellement est une offense à mère nature) ; j’ai l’utopie de croire que la sagesse est au milieu, sans militantisme forcené pour faire ou ne pas faire, mais dans l’hésitation dubitative perpétuelle. C’est ma conception du scepticisme.

-------- Ajout 15/05/2022 : Proverbe latin en discussion
    Dans le très intéressant livre de Laurent Toubiana « Covid19, une autre vision de l’épidémie. Ils ne pourront pas dire qu’ils ne savaient pas. », était cité un proverbe latin : « in dubio pro malo », signifiant parait-il « dans le doute, prévois le pire » (dans le doute pour le mal, selon Google Traduction). Ainsi, mon scepticisme pourrait être accusé de conduire à un catastrophisme perpétuel, invivable, absurde pour ne pas dire idiot. Qu’ai-je à répondre ?
    Ma première réponse a été de dire que c’est plutôt le contraire. Sur ce sujet de la crise covid19 en 2020-2021, le gouvernement et les médias ont été immensément alarmistes, cherchant à terroriser la population, pour qu’elle se fasse vacciner en masse dès qu’apparait quelque chose qualifié de vaccin, et réélise le gouvernement en place les ayant « sauvés ». (Dans le film Hold On, il est expliqué que c’est un principe mafieux : faire peur puis apporter/vendre la protection – j’avais entendu dire que les mafieux proposaient ainsi aux commerçants une très chère assurance contre l’incendie, et ceux qui refusaient voyaient leur magasin brûler, les autres le voyant aussi payaient…). Durant cette entreprise assidue de « terrorisation » (terreur ? terrorisme verbal ?), mon scepticisme allait en sens contraire d’affoler, je résistais aux injonctions à s’affoler. Ce n’est donc pas systématique. Le doute est une libération vis-à-vis du discours dominant, peut-être que ça peut inquiéter quand le discours est rassurant mais ça tend à rassurer quand le discours est affolant. En d’autres termes : en situation d’hystérie collective (plus ou moins organisée), comme actuellement, le doute rassure plutôt qu’il inquiète.
    Le proverbe prétendument sage me parait contestable pour une autre raison : le mot « prévoir » me parait abusif, car je le lis comme « croire », or quand on est dans le doute, la croyance semble abusive. Il s’agirait plutôt d’envisager que de prévoir. Ainsi on nous dit qu’en traversant chaque rue, on peut être renversé par une voiture et mourir, ça ne me fait pas organiser les obsèques (non, telle n’est pas la sagesse) mais relativiser la confiance dans le futur à moyen terme. Le doute généralisé est un regard libérateur, relativisant tout, pas une injonction pour action immédiate frénétique.
    Je conteste donc ce proverbe, qui serait plus sage sous la forme : « dans le doute, prévois le pire éventuellement, ou moins pire qu’annoncé, ça dépend, tout est possible, par principe. »