F cl'HPLC mise en question

On me disait « expert de l’HPLC » mais j’en doute
Souvenirs (± déformés ?) de chromatographiste déchiré, quasi-retraité
par CME ou Kmeuh, 05/08/2022

Contexte historique personnel
1/ La spécificité
2/ L’influence des flacons, des pipetages
3/ Les formes liées
4/ Les parties non détectées
5/ La question de l’étalonnage
Bilan
(dernier ajout)

   Agé de 58 ans, avec 4 cancers dont 1 en cours d’accroissement, faible, je suis en invalidité vraisemblablement jusqu’à la retraite, ou décès s’il survient avant. Je fais ici le point sur un sujet peu confortable, qui m’embarrasse un coin du cerveau, coupablement. J’étais réputé comme « l’expert de l’HPLC » dans mon entreprise, alors que cela me parait grandement abusif, cela constituerait un malentendu plutôt.

Contexte historique personnel
   En 1984, je suis sorti de l’IUT diplômé Analyses Biologiques et Biochimiques, 2e de promotion (en 1e et 2e année : 1er au premier semestre puis j’ai levé le pied) et j’ai réussi à trouver plusieurs offres d’emploi, les deux premières se trouvaient étonnamment être des postes de technicien en HPLC (chromatographie liquide hautes performances). J’ai accepté la première (analyses d’antibiotiques), et décliné la seconde (analyses d’hormones) puisqu’ayant accepté la première. Finalement, deux ans après, le second employeur a racheté le premier et je suis donc devenu employé du second de ces employeurs. Ma formation ne me rendait pas expert en HPLC, pas du tout. Nous avions longuement étudié et pratiqué les chromatographies (analyses chimiques séparatives, de colorants visuellement ou autres solutés avec détecteur approprié) mais consacré moins d’une heure, et de simples généralités, concernant l’HPLC. Et, dans ce travail professionnel, j’ai d’abord été utilisateur de méthodes prêtes à l’emploi (développées par un ingénieur cadre, tandis que j’ai été embauché au niveau Bac technique, quoique mon diplôme soit de technicien « supérieur » Bac+2), puis l’année suivante, quand le développeur de méthodes a souhaité déléguer, il m’a choisi moi puisque diplômé supérieur. Et on m’a envoyé en stage d’une semaine sur l’HPLC en université de chimie (avec généralités, appariements d’ions, élargissements extra-colonne, chromatographie préparative). Je suis revenu avec des tonnes de notes et, pendant les vacances, j’ai écrit des résumés digérant cela. Ces résumés très utiles m’ont été volés 2 ou 3 ans après, une stagiaire me les empruntant avant de déclarer me les avoir rendus mais je ne les avais jamais reçus en retour, elle certifiant que si mais ils n’étaient plu’ en ma possession. Hélas.
   Bref, c’est moi qui développais les méthodes, les « mettais au point » comme on disait. Enfin, parfois la source était une publication disant comment faire (dans les hôpitaux pour analyses sanguines) et, soit on la suivait (avec des adaptations à nos échantillons dépourvus de sang mais avec adjuvants à nous), soit on s’en inspirait pour une version adaptée à nos consommables standardisés (3 modèles de colonnes sur mille possibles, par exemple), soit on essayait nos propres méthodes en vérifiant qu’elles étaient compatibles avec la nouvelle molécule à mesurer, via un léger ajustement si nécessaire.
   J’essayais de faire de mon mieux, mais il y avait clairement des compromis dans tous les sens : optimum théorique et coût en routine, temps passé à développer parfaitement et rendu rapide de méthode, analyse très longue parfaite et adaptation rapide pour rendement dans le rendu de résultats, etc. Donc je savais ne pas faire au mieux dans tous les domaines, j’essayais de faire correctement sans trop prendre de temps.
   Puis est venu le temps de la « Qualité » officielle, type ISO-9000, et tout est devenu régi par de la paperasse commandant que faire, avec certaines exigences effarantes, incompréhensibles, mais il fallait répondre positivement et vite. J’ai donc continué, mais de plus en plus mal à l’aise, conscient que la perfection exigée n’était absolument pas ce que nous faisions, mais personne ne semblait s’en soucier, alors je touchais mon salaire et faisais profil bas, simplement. Puis j’ai été transféré du service Contrôle Qualité au Service Recherche et Développement, pour y créer un poste d’HPLC (à temps partiel avec d’autres activités, ultérieurement majoritaires), sans plu’ sous-traiter cela au service QC débordé. En R&D, les besoins étaient plus larges : dosages aussi de vitamines, de substrats, etc. dans diverses sources, pas seulement nos produits de la gamme que je connaissais (qui avait presque un seul adjuvant, quoique ce polymère soit fragmenté par le process). A la fin, ce n’était plu’ de l’HPLC mais de l’UHPLC (Ultra Hautes Performances) avec pressions énormes, comme 1000 atmosphères au lieu de 100 atmosphères, vitesses et sensibilités très accrues, déchets réduits.
   Maintenant que j’ai été mis en invalidité (pour raison dite psychiatrique : inconfort psychologique extrême à être acheté par mon salaire, pour cacher les fautes inhérentes à nos produits, sans pouvoir attendre la retraite pour le dire puisque menacé de mort prochaine par cancer), je reviens dessus et j’explique ce qui me gênait, un peu enterré en moi sans y penser de manière claire et ordonnée. Je vais donc innover ici, même si d’autres personnes ont pu aboutir aux mêmes conclusions, voire les exprimer en clair avant moi (je n’ai pas fait d’enquête à ce sujet, je vide mon sac simplement, en classant les idées).
   [Note : Pour situer à quoi ressemble une analyse HPLC (voir mon dessin sous le titre) :
A/ la machine est une pompe, qui prend des solvants dans des bouteilles (solvants de composition à déterminer) pour (après une vanne d’injection, par où on injectera le produit à analyser) passer dans une colonne séparative (genre de long filtre sélectif tubulaire extérieurement en métal, de taille et propriétés diverses, avec contenu chimique divers à choisir) puis un appareil de détection (mesure de lumière ou autre, à sortie électrique) puis arrivée en déchets (à éliminer/recycler).
B/ le rapport d’analyse est un tableau des tailles de pic en fonction des temps en sommet de pic, après un graphe montrant la valeur mesurée (densité optique ou microvolts) en fonction du temps ; le temps-zéro est le top d’injection, plus tard arrive la sortie de ce qui n’a pas été retenu par la colonne (temps mort, artefact négatif), puis sort progressivement ce qui a été retenu peu puis beaucoup dans la colonne, puis c’est le top programmé de fin d’analyse, autorisant à ré-injecter pour une analyse d’autre échantillon. Ce qui sort encore plus tard (très dispersé/élargi donc amoindri) ou jamais n’apparait pas, ce qui sort avec le temps mort est illisible dans l’artefact négatif d’injection, mais entre les deux on a comme une forêt de pics, avec les diverses molécules sortant les unes après les autres, un logiciel mesurant les hauteurs liées aux concentrations (ou les surfaces, avec avantages et inconvénients par rapport aux hauteurs). C’est une technique de quantification d’une molécule au sein d’un mélange complexe (ou simple).
C/ Le compte-rendu extrayant les résultats bruts pour conclure à diverses conformités possibles, sur des moyennes inter-injections par exemple. Pour un contrôle qualité, il s’agit de vérifier si la quantité est conforme aux tolérances, en R&D c’est la même chose ou davantage complexe sans tolérances préexistantes voire en mode qualitatif sans mesure quantitative principale (recherche d’impuretés connues ou non, de produits de dégradation, etc.).
]

1/ La spécificité
   Au niveau qualitatif, la spécificité qui est requise est l’assurance qu’à un temps de rétention donné pour reconnaître telle molécule, il n’y a pas d’autre molécule qui sort. En fait, puisque chaque molécule produit un pic en cloche, ce n’est pas seulement au sommet de pic qu’il doit n’y avoir qu’une seule molécule mais entre le début et la fin de ce pic (surtout en analyse de surfaces). Toutefois, si le sommet d’un pic interférent est peu après le début (ou peu avant la fin) du pic principal, cela peut produire une double bosse qui n’est pas confondue invisiblement mais produit un point de vallée (avec calcul de surface possible quoique imparfait présupposant que « B dans A » = « A dans B », ce qui n’est pas certain) ou une rupture de pente (plus ou moins visible, et avec intégration en surfaces douteuse, tangentielle ou vallée-base).
   Idéalement, il n’y a que le produit à quantifier au moment voulu, mais comment le garantir à 100% ? La preuve de spécificité est théoriquement l’injection de la totalité des molécules différentes dans l’univers, connues et inconnues, en vérifiant qu’elles ne gênent pas (soit ne sortant pas au moment gênant, soit n’étant pas détectées, les deux étant confondus dans la situation : « n’interférant pas »). Mais il est totalement impossible de réaliser, sans budget et délai infinis cette vérification, alors… on ne la fait pas, on se contente de vérifier que les adjuvants (injectés seuls 1 par 1) ne sont pas interférents, et on peut faire varier les conditions chimiques en espérant séparer ce qui ne l’était pas initialement, comme l’acidité, la force ionique, le taux de modificateur organique, etc. et si on n’a rien vu, on peut espérer qu’il n’y ait rien à voir, même si ce n’est pas une garantie totale.
   En routine, quand il y a quantification du pic intéressant (ou des pics intéressants au pluriel comme une analyse d’acides aminés quantifiant une vingtaine de molécules, on espère qu’il n’y a rien dessous, et on renvoie au développement de méthode censé avoir établi la spécificité qualificative, même si ce n’est pas vrai. Donc la spécificité quantitative n’est pas garantie non plu’. J’en avais conscience mais je ne le disais pas, craignant que le département soit fermé avec mise au chômage si je faisais trop entendre cette évidence, quoique accessible à tout esprit innocent examinant la technique. Les auditeurs n’y voient que du feu, apparemment ils sont pointillistes côté administratif mais archinuls en science et en logique (comme les rédacteurs de norme-qualité internationale), tant mieux en un sens (pour les entreprises), tant pis pour les clients, les payeurs/rembourseurs…
   La seconde décennie de mon activité, nous avons amélioré un peu la fiabilité en spécificité, en achetant des détecteurs à barrette de diodes, vérifiant la pureté spectrale des pics entre le début et la fin de pic, pouvant détecter la présence de molécule différente (si son spectre d’absorbance était différent notablement). Quand il n’y avait pas d’alerte de ce côté, même sur échantillon volontairement dégradé, cela consolidait l’affirmation de spécificité satisfaisante. De même, l’industrie pharmaceutique à énorme budget se permettait de l’analyse bidimensionnelle, avec chromatographie + spectrométrie de masse par exemple, pour séparer certains cas de molécules différentes sortant faussement ex-aequo avec l’une des deux techniques. Mais c’était impossible avec nos budgets et requêtes en rentabilité. Et sans être absolu non plus, simplement amélioré grandement. Il y avait aussi la chromatographie chirale qui permettait de séparer les molécules jumelles (dans un miroir) qui avaient propriétés chimiques très proches mais biologie totalement différente. On commençait à l’envisager quand je suis parti mais ce n’était pas encore en service, sans reconnaître officiellement que sans cela, on manquait de spécificité, confondant les stéréo-isomères.
   (Ajout 06/08/2022 : Je précise un détail important, c'est que la spécificité pratique inclut une autre difficulté. On peut injecter à part (voir où ça sort, interférant ou non) les adjuvants, les autres produits manipulés dans la société, ou chez les fournisseurs susceptibles de se tromper de poudre envoyée, mais... cette logique ne s'applique pas pour les "impuretés" présentes éventuellement dans la poudre étalon de la molécule à doser. De ce côté, on n'a pas le produit disponible à injecter séparément, il faut le faire "sortir" du pic principal pour savoir qu'il existe, et rien ne garantit qu'on y parvienne, sans que cet échec prouve qu'il n'y avait rien à séparer d'une façon pas encore essayée. C'est presque rédhibitoire. Enfin, dans mon scénario hypothétique d'injecter 1 par 1 toutes les molécules de l'Univers, ces impuretés en feraient partie, mais ce n'est clairement pas faisable en un temps limité, et avec des moyens financiers non infinis, des capacités de production chimique de molécules non vendues en fait indisponibles, etc.)

2/ L’influence des flacons, des pipetages
   J’ai eu l’expérience il y a quelques décennies d’une molécule aux propriétés étranges, plus ou moins qualitativement : absence quand on l’injecte (en petite quantité) ou en tout cas quantitativement (quantité infime détectée quand on en injecte une grande quantité). Pensant à ce dont discutaient des collègues, j’ai ajouté un agent mouillant, et tout est devenu détecté : sans ce tensio-actif, la molécule se fixait irrémédiablement sur les plastiques et verres (embouts de pipettes, flaconnage de passeur d’échantillons) disparaissant du liquide injectable (alors que la molécule dans le produit, même fixée, était disponible pour action antibiotique contre les bactéries, donc pas absente du tout.
   Ce cas était extrême en tout ou rien, mais comment garantir qu’il n’y a pas un phénomène voisin, partiel, dans les autres techniques, pour d’autres molécules ? Je n’ai pas cherché la réponse à cette question, il n’y avait pas le temps de chercher la petite bête avec doute maximal. Ce qui semblait bon était compté bon. De même, la discordance de composition entre échantillons et étalons pouvait théoriquement fausser les mesures, par des phénomènes d’adsorption partielle. Je n’étais pas expert garantissant que ça ne se produisait pas, je l’envisageais dans mon coin sans refuser le travail requis, faisant mon salaire. Je n’en suis pas fier, a posteriori, mais ça se passait ainsi.

3/ Les formes liées
   Un autre aspect similaire consiste à observer que la fraction mesurée, quantifiée, n’était que la partie libre dans l’échantillon, sans que sorte au même temps la partie fixée à des protéines ou polymères de la formule. Une quantification était faite, répétable et maitrisée, mais sans prétendre mesurer la quantité totale de cette molécule, au sens de libre + liée. Chimiquement, seule la partie libre était comptée, mais biologiquement la partie liée pouvait se délier en cours d’incubation bactérienne pour devenir active, ce que ne chiffrait pas la chimie, ainsi fausse.
   Là aussi, j’en avais conscience, mais je faisais « comme d’habitude », comme ce qui se faisait avant moi, sans appeler à jeter l’HPLC à la poubelle et moi au chômage. Les auditeurs considéraient que c’était moi l’expert et considéraient que ma parole valait vérité en matière chimique, eux persécutant les erreurs de date et de signature seulement, les numéros de documents liés.
   Avec le recul, je peux dire qu’il y avait abus, qu’il y avait faute.

4/ Les parties non détectées
   Hors de la partie quantitative du contrôle qualité de routine, il y avait des analyses qualitatives (ponctuelle au QC, fréquentes en R&D), type « est-ce que cet échantillon montre plein de pics de dégradation de la molécule active ? ». La réponse était ce qu’on voyait, mais sans garantir qu’il n’y ait pas des choses non-vues (non visibles avec le volume mort, ou non éluées avant le temps final, ou non-extraites, ou adsorbées quelque part dans le process, ou dégradées avant la détection opérée, ou non détectables avec le détecteur employé et le réglage choisi). Ce n’était pas parfait, mais on répondait comme exigé. Je disais « je n’ai rien vu » sous-entendu « parmi les produits de dégradation que peut montrer cette technique-ci, sans garantir qu’une autre technique ou sensibilité accrue ne pourrait pas en trouver ».
   Un proverbe célèbre chez les analystes et « on trouve ce qu’on cherche », sous-entendu : « ce qu’on ne cherche pas, on ne garantit pas qu’on le trouvera ». C’est très connu en interne, inconnu ou incompris en externe. Les journalistes et le public semblent conclure : faisons confiance à l’expert qui nous rassure, peu importe les micro-débats impliquant des pseudo-experts bizarres hérétiques. C’est une erreur mais c’est comme ça que ça se passe. On l’a vu avec le nuage de Lubrizol, et hors chimie : avec le virus covid19, les vaccins anti-covid, haine à la clé (« emmerder au maximum » clamait le président, armé de police avec pistolets et fausse justice faisant respecter même les lois mauvaises).

5/ La question de l’étalonnage
   Quand je suis arrivé en 1984, les techniques étaient considérées calibrées comme en spectrophotométrie en cuves, la densité optique lue (ou intégrale/surface de pic) étant proportionnelle à la concentration avec un facteur constant, dit epsilon ou extinction ou absorptivité. Mais on a rencontré une dérive catastrophique de toutes les méthodes à la fois, tendant à rejeter les lots pour concentrations trop basses. Après vérification du calibrage, celui-ci avait changé, par dérive du détecteur. Des évolutions technologiques sur les détecteurs ont tendu à diminuer cette relativité, mais la façon automatiquement juste était l’étalonnage systématique le jour même, en gérant un stock de poudres étalons.
   Toutefois, il y avait des sources d’incertitudes sur les titres de poudres donnés par les fournisseurs, sur les poudres vieillissantes avec sortie fréquente du frigo (petit choc thermique) et ouvertures multiples de flacon (au risque d’hydratation croissante), sur les pesages, sur les volumes de solvants, sur les pipetages de dilution. Idéalement, un calcul d’incertitude aurait été opéré, pour vérifier la compatibilité de tout cela avec les tolérances sur les résultats finaux, mais cela n’a jamais été fait. J’aurais pu le faire, mais cela ne me paraissait pas probant pour plusieurs raisons, notamment : les tolérances sur les appareils étaient définies sans se préoccuper des besoins, via une norme officielle (pour les micropipettes notamment) et quand l’outil était hors-tolérance au contrôle semestriel, il fallait dire que ça n’avait pas d’impact, car impossible de déclarer non crédibles six mois de mesures à refaire et en faisant rapatrier les lots partis à la vente… alors il valait mieux ne pas se poser la question, industriellement, tant pis pour la logique scientifique, et il n’y avait aucune charte de déontologie concernant la fiabilité de mesure. Hum.
   Maintenant je peux dire que ce n’était pas satisfaisant, à l’époque je ne pratiquais pas cette forme de suicide, qui est pourtant une tendance en moi, mais conduisant à l’action seulement dans le domaine sentimental, pas encore professionnel (jugé secondaire pour le moi, un peu je-m’en-foutiste de ce côté-là, en me disant « puisque c’est ce qui se fait, continuons, peu importe »).
   Point de détail particulier qui me revient en mémoire : dans les étalons, on ne mettait pas d'adjuvant, alors que théoriquement il pouvait influer, soit en interférence détectée, soit en liant une fraction du produit à doser, soit en interférant dans le processus d'adsoption de celui-ci sur les flacons du passeur d'échantillons, etc. (Ajouter notre adjuvant stérilisé n'aurait pas garanti que cela reproduise exactement celui du lot à tester, mais ç'aurait été un pas dans la bonne direction). Je crois que j'avais fait l'essai sur une molécule (car détectée à une longueur d'onde où l'adjuvant était très visible) et je n'ai pas noté de différence significative, mais ne pas voir de différence ne prouve pas qu'il n'y en a pas (l'absence de preuve quant à la différence n'est pas une preuve d'absence de différence), et de plus il s'agissait d'un certain lot d'adjuvant, stérilisé 1 seule fois, sans prétendre couvrir la totalité des lots et des stérilisations, pas forcément reproductibles en sous-produits générés. Pour les analyses en UV profond à 195nm (longueur d'onde très peu spécifique montrant presque toutes les molécules organiques), cela pouvait être particulièrement critique, mais théoriquement : partout, avec toutes les méthodes. Je ne dis pas que j'en fais des cauchemars a posteriori, mais je me sens fautif, pour manque de rigueur franc.
   Autre point relevant de ce paragraphe ; la pratique consitait à valider une seule fois (durant la "mise au point") la "linéarité" (proportionnalité) d'une technique, sans la vérifier en routine (trop lourd, trop cher) mais en théorie la situation avait pu changer, notamment à cause de la saturation différente liée à un lot sale de modificateur organique. Oui en théorie mais non en pratique, trop long trop cher (pour notre entreprise), OK, mais... hum. (Ajout 06/08/2022 : Enfin, la linéarité dans les publications et normes officielles est traitée de manière idiote et j'ai inventé mieux [voir mon site http://www.kristofmeunier.fr/Linearity_F.htm] mais il restait une gigantesque imperfection de principe : comment prendre en compte l'invertitude des pipetages pouvant fausser les dilutions, surtout en cascade ? Je n'ai jamais creusé la question, paralysante, non qu'il n'y ait pas de problème mais peut-être qu'on ne pourrait plu' rien faire de satisfaisant. Et puis, 6 mois après, ce pourrait être remis en cause si une pipette est déclarée hors-norme, avec démenti de la méthode HPLC dite validée quantitativement et transmise au QC déjà, catastrophe ?)

Bilan
   Si quelqu’un a pu éventuellement me désigner comme le grand expert-HPLC de la société, disant le vrai en la matière, et garantissant la fiabilité de ce qui était fait, c’était (ou ç’aurait été) une erreur : en toute sincérité, j’avais d’immenses doutes sur la fiabilité des mesures et la conformité des méthodes aux instructions officielles (aberrantes, infaisables en spécificité).
   Je me sens mieux, maintenant que je ne suis plu’ au travail, n’ayant plu’ à mentir par omission. Toutefois, je ne suis pas fier de ma « carrière » de ce côté-là. Quelqu’un aurait pu casser ce que je faisais comme j’ai cassé les prétentions à la Qualité dans plein de domaines. Je l’avoue aujourd’hui, et ça me soulage, en un sens. (De 2012 à 2018, mon travail est devenu 20% HPLC + 80% identification bactérienne par séquençage ADN et, dans ce dernier domaine de la même façon, je faisais ce qu'on m'avait demandé de faire, comme on m'avait dit de le faire, même si j'avais des gros doutes que je faisais taire pour ne pas être puni ou viré ; après ma mise en invalidité, je me suis autorisé à recenser ces doutes sur le séuençage avec exploitation informatique et les exprimer (http://www.kristofmeunier.fr/gene0.htm), mais il est vrai que je ne l'avais pas encore fait pour ce qui était devenu mon activité secondaire : l'HPLC).
   Je demanderai à mes remplaçants (au QC et en R&D) s’ils ont des corrections rassurantes à apporter, on verra. S’ils ne disent hélas rien, je ne les citerai pas nommément, car leur emploi et salaire pourraient être en partie menacés, et je ne leur souhaite pas exclusion et misère. L’imperfection, c’est la vie, en un sens, il est seulement dommage que les politiciens et journalistes, incompétents, clament que La Science dit Le Vrai (principe scientiste, non scientifique, théoriquement humble et plein de doute).
   Le président Emmanuel Macron a dit publiquement ; "ne pas croire les scientifiques, c'est être paranoïaques", ce très grand incompétent ignore simplement que plein d'employés scientifiques savent qu'ils disent très douteux, peu crédible... mais l'incompétent grand grand chef a été réélu triomphalement. Soupirs, défaitistes, semi-coupables même si personne ne veut l'entendre...

- - - - - - - Ajout 01/04/2023 : écrit un 1er avril mais sérieusement
   Je pense pouvoir ajouter un point, concernant l’anomalie en spécificité de l’HPLC (et autres techniques similaires comme l’électrophorèse capillaire) : le malentendu semble venu de la décision managériale (incompétente) privilégiant la perfection administrative, et ignorant les imperfections techniques insolubles en pratique. Le Scientisme (croyance que la Science actuelle dit Le Vrai, tout Le Vrai, rien que Le Vrai) exige un tel vrai ici en spécificité ce qui serait parfait, mais avec un minimum de recul épistémologique (= en philosophie des sciences), on comprend que tout ce qu’affirme la science expérimentale n’est pas « vrai certain » mais « possiblement vrai jusqu’à preuve du contraire, cette preuve étant possible à l’avenir ». Bref, des gens à l’esprit étriqué simpliste, "trois ans d’âge mental", ont pris le pouvoir officiel et industriel en écrasant des adultes lucides et "dubitatifs pour mille excellentes raisons". Les formations en sciences expérimentales sont tellement mal faites (récitation et jonglage prétendant au Savoir, sans humilité autocritique) que ce malentendu a pu acquérir force de loi, critère de qualité officiellement exigé.
   C’est triste ou dramatique, mais c’est loin de moi maintenant (invalide cancéreux métastasé) et je m’en fous un peu (ou je le devrais pour me sentir apaisé).