Un élève avec insuffisamment de participation orale, dommage ?
(Persécution moderne des « enfants sages »)
par Anchoké Vréman, 13/01/2022

(dernier ajout)

   Etant adolescent autrefois, j’étais premier de la classe malgré la note systématique de 0/20 en participation orale (qui me semblait une exigence très injuste). Devenu adulte, j’ai développé une argumentation donnant tort en cela aux enseignants (en annexe d’un livre refusé par tous les éditeurs comme « beaucoup trop logique, effrayant »… en 1993). Depuis, je suis devenu père (adoptif), et tous* les professeurs reprochent pareillement à mon fils son manque de participation orale, comme s’ils appliquaient ultra-stupidement un dogme que j’ai démoli il y a près de 30 ans, c’est affligeant. (* : tous ou presque : 7/12 = 58%).
   Sans les obliger à lire mon gros livre philosophique entier, sceptique devenu illégal (au pays prétendu de la liberté d’opinion, en fait du mensonge blablateux), je vais citer ici l’argumentaire en question (partie I), puis ajouter des commentaires actualisés (partie II).

I – Démolition initiale (extrait du livre « Échapper à la dictature réaliste », annexe 3 de la première partie « Contre la Réalité », pages 74-77 de la version pdf A4 gratuite)
  « Ne participe pas assez à la classe... »
  Le fait que notre société (occidentale, moderne) ait glorifié la communication ne semble s'accompagner d'aucune réserve, aucun remords. Mieux que la soumission silencieuse à une autorité, mieux que la muette hostilité entre égoïstes, une situation où chacun s'exprime fait figure d'idéal. Cependant, si le droit à la parole est respectable, il est atroce qu'une obligation de discourir ait été instituée, dans les collèges et lycées. Les élèves « sages », timides et silencieux, qui avaient autrefois d'excellentes notes de « conduite », sont maintenant sanctionnés pour leur comportement effacé. Les disciplines linguistiques, obligatoires, comportent ainsi très souvent une note de « participation orale» (spontanée) et dans bon nombre d'autres matières, se mettre en avant pour clamer des idées, même inexactes, tient lieu de nécessaire gage d'intérêt vis-à-vis du sujet abordé. Bref, l'école n'a pas fait qu'abroger la dictature disciplinaire qui bridait les extravertis, elle a institué un nouveau dogme, qui ne respecte plus les tempéraments introvertis. Et les individus pris pour cible étant par nature discrets et passifs, cette pression psychologique n'est pas dénoncée. Elle le mériterait pourtant : dans une société qui se prétend tolérante, avoir imposé comme qualité scolaire indispensable la prise de parole spontanée constitue une véritable répression idéologique contre l'introversion.
  Pour les éducateurs n'ayant trouvé aucun intérêt à ce livre, il paraissait utile de résumer et développer les idées qui ont été abordées, dans divers chapitres, sur le thème de l'enseignement.
A - L'école et l’épanouissement des élèves
• La première question qui se pose est la suivante : l'école n'est-elle pas fondamentalement une institution intolérante - aussi généreux que puissent être ses buts ? Il y a, dans l'idée d'éducation, deux éléments : d'une part amener l'élève à s'intégrer harmonieusement dans la société, d'autre part lui donner les moyens de devenir un adulte heureux. Le second point est d'ailleurs présenté comme une justification altruiste du premier, pleinement à même de réfuter les éventuelles accusations d'embrigadement.
  Pourtant, le fait de guider un enfant suppose que ses propres choix ne soient pas respectables, que ce petit être sans grande expérience ne soit pas en mesure de discerner ce qui fera à terme son bonheur. C'est dans cet esprit qu'on le conduit sur le chemin adéquat, et cela avec fermeté si ses « caprices » l'amènent à résister. La déclaration universelle des droits de l'homme légitime ce principe : « les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants » - ce qui ne fait que départager en cela parents et gouvernants, en cautionnant l'idée que ce n'est pas aux enfants eux-mêmes de choisir.
  Les pédagogies modernes, qui prétendent aborder l'enfant comme un individu cohérent et respectable, et non comme un « adulte en devenir », restent elles-mêmes des pédagogies. Leur but est un guidage, une orientation, même si le moyen technique employé est plus proche de l’incitation à la découverte utile que de la leçon autoritaire.
  Si l'enfant était vraiment considéré comme une personne à part entière, dont les idées sont respectables, l'éducation apparaîtrait comme une entreprise d'endoctrinement, de lavage de cerveau – que le procédé employé soit autoritaire ou insidieux. Répondre que l'intellect enfantin constitue un vide à remplir, sans que cela nécessite la moindre destruction, ne serait pas honnête : l'égocentrisme des premiers âges est bel et bien extirpé, au moyen d'incitations ou sanctions.
  Finalement la prétendue générosité de l'éducation repose sur le principe de l'altruisme intolérant (ou l'intolérance altruiste), luttant pour le bien d'autrui en imposant un modèle jugé optimal et en détruisant les idéaux différents. Un discours adéquat consolide cette position : une dictature généreuse n'est pas une dictature mais une oeuvre de charité, un sacerdoce. La répression scolaire de l'introversion peut parfaitement s'insérer dans ce cadre ; loin de constituer un abus de pouvoir et une trahison ponctuelle des principes de tolérance à l'égard des non-violents, elle ne ferait que révéler un vaste malentendu.
• Le fait que des enfants soient allés réclamer, au siège de l'ONU, l'obligation scolaire semble cependant contredire formellement l'idée que l'éducation est inévitablement une forme d'oppression. Il est instructif de découvrir les circonstances de cette action revendicative, décrite dans l'ouvrage « Si tous les enfants du monde... ». Ce livre est le récit d'une croisière « de réflexion », organisée et encadrée par des adultes, au cours de laquelle une quinzaine de jeunes de différents pays font la fête... et méprisent conjointement le seul personnage touchant : une petite Cambodgienne discrète, solitaire et souffreteuse. Le texte élaboré reflète ainsi essentiellement l'opinion d'enfants sociables et conviviaux, ce qui aboutit à un texte partisan, sans valeur universelle. Le point de vue des silencieux est, là comme ailleurs, évidemment ignoré – de même que le sentiment d'enfants ayant refusé l'éducation au point de ne pas acquérir le langage. Réclamer l'école obligatoire pour tous exprime clairement le penchant qualifié plus haut d'altruisme intolérant. Si, en effet, les enfants de la rue étaient en position de réclamer le droit d'aller à l'école contre l'avis parental (en échappant ainsi aux travaux de peine, à la mendicité forcée ou à la prostitution), il est révélateur que les nantis scolarisés n’aient pas songé à formuler le droit complémentaire, de refuser l’école contre l’avis parental. Il suffisait de penser au très petit enfant, fondant en larmes les premiers jours de classe, quand il est abandonné dans un milieu tout d'abord inconnu et effrayant, puis au milieu d'une meute de jeunes caïds hurlant leur santé, agressant les calmes, écrasant les faibles, se moquant cruellement... Certains autistes, notamment, ne parviennent pas à dépasser ce stade traumatique de la relation avec les autres enfants. Il suffisait aussi de penser à la réprimande du maître pour insuffisance de rendement ou d'effort, qui évoque plus le travail forcé que la bonté valorisante d'un être désintéressé.
  La scolarité est donc bien imposée dictatorialement, même si c'est avec de bonnes intentions et si l'aspect fondamentalement répressif n'apparaît qu'aux quelques enfants supportant mal la vie de groupe.
• Si, dans ce contexte, la répression de l'introversion n'est pas vraiment une anomalie, il est tout de même permis de se demander par quel subterfuge elle peut passer pour un acte généreux. C'est à ce stade du débat qu'intervient la doctrine philosophique ou psychologique selon laquelle la condition humaine serait fondamentalement basée sur la sociabilité, l'extraversion. Les introvertis seraient ainsi des individus névrosés, sous l'emprise d'une pudeur intuitive excessive. Pour leur permettre de « s'épanouir », il faudrait donc leur faire violence, les obliger à chanter en public, danser, faire du théâtre – ou plus simplement : prendre la parole pour clamer haut et fort de vagues idées sur n'importe quoi. Même si la transition est douloureuse, il est attendu de cette éducation presque thérapeutique un éveil à la vie de groupe, une découverte des bienfaits de l'extériorisation, de l'expression. Hélas, il ne s'agit que d'une hypothèse, et elle n'est confortée que par des exemples limités : quelques extravertis effectivement refoulés qui se recroquevillaient douloureusement et se sont ouverts en devenant euphoriques. Rien ne prouve l'universalité de ce principe ; il peut y avoir des introvertis heureux, que l'extériorisation forcée ne ferait que blesser et humilier sans pouvoir les convertir.
• Certes, les introvertis intellectuellement brillants, et relativement confiants en eux-mêmes, peuvent résister à cette pression, en acceptant avec le sourire des notes minables ou nulles en musique, en expression corporelle et dans les disciplines littéraires s'attachant beaucoup à la participation orale. Être bon élève en orthographe, mathématiques et travail manuel, par exemple, suffit pour réussir une scolarité menant à la profession de technicien.
  Il n'en reste pas moins qu'à qualités intellectuelles comparables, les introvertis sont maintenant pénalisés par rapport aux extravertis. Et pour les médiocres, cette punition accroît la dévalorisation, la situation d'échec. D'innocentes victimes font donc les frais du dogmatisme effarant de certains psychologues populaires, confondant leurs intuitions avec une connaissance objective. Même s'il ne s'agit pas ici de remettre le principe éducatif en question (l'auteur n'aime pas les enfants qui hurlent, agressent et réquisitionnent, et donc approuve ce qui pourrait les calmer durablement), il fallait rappeler qu'une institution s'arrogeant le droit de dresser les consciences risque de conduire à des déviations profondément injustes.
B - L'argument économique
• Comme nous venons de l'expliquer : si l'école n'était destinée qu'à rendre heureux ses élèves, il serait tout à fait abusif qu'elle pénalise et cherche à changer les introvertis. Cependant, elle a aussi pour vocation de préparer à une vie professionnelle, et de ce côté, le dynamisme et l'allant communicatif sont considérés comme des facteurs importants de réussite – ce qui justifierait leur enseignement.
  Il faut cependant noter que dans bien des domaines professionnels, prendre la parole sans cesse et pour ne rien dire, au lieu de réfléchir posément et en profondeur face à un problème, ne constitue pas un atout mais un grave facteur d'inefficacité. De même, se donner en spectacle et pérorer savamment peut favoriser la carrière personnelle, mais rechercher humblement des solutions tangibles pourrait être plus utile à l'entreprise. Les qualités requises pour un électronicien ne sont pas celles requises pour un vendeur. Le verbe et l'esbroufe peuvent être facteurs de succès dans les métiers relationnels, mais pourquoi l'école devrait-elle faire perdre leurs qualités propres aux jeunes gens qui auraient pu devenir des techniciens consciencieux ou de brillants inventeurs solitaires ? S'il y a, dans une société, répartition des tâches, pourquoi favoriser un comportement particulier ?
• Il ne faudrait pas oublier que le jeune cadre dynamique, devenu symbole de réussite professionnelle, est généralement un improductif. S'il n'y avait que des gestionnaires et des marchands, il n'y aurait rien à consommer. En attendant une hypothétique robotisation universelle, déchargeant l'humanité de toute tâche agricole ou industrielle, il est donc nécessaire que subsiste une main-d'oeuvre productive. Or, justement, certains individus aspirent à de tels emplois anonymes, discrets, en échange d'une paye simplement garante de confort matériel (murs protecteurs, nourriture). Pourquoi donc l'école devrait-elle s'acharner à donner de l'ambition à ceux qui n'aspirent pas à briller socialement, ceux qui veulent seulement rêver en paix, après une journée de travail sécurisante par sa monotonie ?
  Il ne s'agit pas de militer pour une société comme « le meilleur des mondes » d'Aldous Huxley, où les médiocres et les travailleurs de peine sont dressés à être heureux de leur sort. L'idée développée est plutôt que les extravertis, talentueux ou non, devraient simplement se battre entre eux, pour obtenir les postes de décision et de relation, sans chercher à mêler à leur lutte les introvertis, médiocres ou brillants. Pourquoi est-il maintenant considéré pathologique d'aspirer simplement à un gagne-pain non traumatisant, sans chercher un « travail intéressant » – ou en évitant même un tel emploi, perçu comme triste gaspillage d'intelligence et de créativité hors du monde intérieur ?
• Plusieurs arguments peuvent être opposés à cette remise en question :
1- Si les introvertis n'aspirent pas à des emplois supérieurs, il est normal que l'école réserve ses congratulations aux élèves voulant « aller loin ».
2- Les emplois subalternes devenant de plus en plus techniques, les tâches répétitives régressent – et, de plus en plus, la condition d'ouvrier réclame adaptabilité et talent d'improvisation.
3- Laisser des « cerveaux » devenir ouvriers ou balayeurs serait, sur le plan économique, du gaspillage puisqu'ils auraient pu apporter des idées rentables.
4- Un ouvrier ou employé accordant une grande importance à sa vie professionnelle et à sa carrière présente un meilleur rendement qu'un rêveur considérant son travail comme fort heureusement machinal.
  Nous allons tâcher de répondre sur chaque point.
1- Le problème de la pression scolaire contre les introvertis n'est pas que ceux-ci se voient, sagement, découragés de devenir cadres. L'injustice vient des reproches systématiques, au collège ou lycée, qui perturbent la tranquillité d'esprit des personnes visées. A l'adolescence notamment, où un certain dégoût vis-à-vis de soi-même peut intervenir – suite à une déception sentimentale par exemple – une dévalorisation supplémentaire s'avère grave, le risque étant la dépression ou le suicide. Pour favoriser la promotion sociale des bavards sans humilier les silencieux, il suffirait d'abandonner tout critère d'extériorisation dans les disciplines obligatoires, en développant parallèlement des matières optionnelles, à fort coefficient, telles que théâtre, rhétorique, boniment publicitaire, tac au tac verbal, etc... Les élèves seraient alors jugés sur leur intellect (ou leur habileté technique) et c'est indépendamment qu'ils auraient à choisir leur but dans la vie sociale : soit ambition et extériorisation, soit pudeur et modestie.
2- En ce qui concerne l'adaptabilité et l'improvisation, le lien avec l'extraversion semble une erreur. Un élève, même s'il se refuse ou hésite à prendre la parole devant ses camarades, peut prouver à l'écrit qu'il acquiert sans problème les nouvelles leçons, qu'il trouve sans difficulté ni lenteur les solutions des problèmes originaux faisant l'objet des devoirs surveillés, Pourquoi une pensée brouillonne s’étalant à haute voix garantirait-elle particulièrement des qualités d’ecoute, de réflexion, de clairvoyance, d’originalité ?
3- Examiner les cas des individus à la fois réservés et talentueux dans un domaine économiquement utile ne conduit pas forcément à décréter que ceux-ci doivent atteindre des fonctions d'encadrement, de direction, et donc acquérir une certaine extraversion. Au contraire, s'ils développent mieux leur pensée dans la tranquillité que sous l'invective verbale, il faudrait leur aménager un cadre sécurisant, solitaire, et un mode de communication essentiellement écrit. Il serait bien sûr absurde d'exiger de tels postes, sur mesure, mais on peut présenter ainsi la situation : soit la compétence de ces individus s'avère indispensable, et dans ce cas il faut leur proposer un poste non conflictuel, pour les attirer et leur permettre de travailler sans inhibition ; soit ils ne sont pas indispensables au point de créer pour eux des niches protégées, et dans ce cas, il faut leur laisser la liberté de devenir balayeurs ou éboueurs s'ils le désirent,
4- Il est totalement inexact d'affirmer qu'un extraverti est toujours plus travailleur qu'un introverti. Certes, un employé dynamique et cherchant à mériter incontestablement une promotion pourra abattre une tâche considérable, tandis que le rendement d'un employé souhaitant rêvasser paresseusement pendant les heures de travail sera particulièrement minime. Mais il serait injuste de favoriser systématiquement les extravertis à l'embauche, car nombre d'entre eux sont des rebelles voulant imposer leurs desiderata personnels et ne pas se laisser « exploiter », tandis que des employés réservés accomplissent leur travail avec le plus grand sérieux, notamment pour prévenir tout risque de réprimande. Quand des syndicalistes raillent leurs collègues trop soumis aux exigences patronales, des introvertis passent pour stakhanovistes. La situation d'appel à la grève est d'ailleurs déchirante pour un employé discret voulant par-dessus tout éviter les conflits : le choix se limite à soit mécontenter la hiérarchie, soit fâcher très gravement les collègues – ce qui rappelle d'ailleurs la situation de l'élève exhorté à s'extérioriser, qui a le sentiment de devoir choisir entre subir les sanctions professorales et dénuder sa pensée devant ses camarades.
• Il est peut-être utile de justifier cette perception du monde du travail, et l'absence de corrélation entre conscience professionnelle et importance affective accordée au travail en général. Prenons l'exemple ponctuel d'une personne de caractère, attendant de sa profession une vie relationnelle active et des succès sous une forme ou une autre ; persuadée de sa valeur, elle entend être convenablement récompensée par le patron qui l'exploite. Dans ce contexte, la vie professionnelle s'accompagnera d'exigences, et si celles-ci sont frustrées, un sentiment de trahison peut émerger : l'employeur ne fait rien pour motiver ses meilleurs employés. D'où la sanction sournoise, la punition, que constitue le travail au ralenti, sabotant la performance de l'entreprise. Inversement, un employé discret et honnête, choisi pour un emploi qui ne l'intéresse absolument pas, peut se sentir en situation de débiteur. Il doit en effet son confort à l'employeur, et accomplir au mieux le travail confié permet d'espérer que chacun trouvera son compte dans la situation – tranquillité d'un côté, dévouement apparent et rentabilité de l'autre. Ainsi, un technicien égocentrique, persuadé de l'absurdité de la science en général et de sa tâche en particulier, peut masquer – ou vouloir payer discrètement – son hypocrisie en accomplissant son travail avec zèle, tandis que ses collègues, persuadés de la grandeur et de l'importance de leur tâche, traîneront des pieds en se disant démotivés, dégoûtés par l'absence de reconnaissance (verbale ou financière) vis-à-vis de leur fondamentale contribution.
  Paradoxalement, un discours psychologiste glorifiant l'extraversion et la communication a envahi les entreprises, substituant des dogmes universitaires verbeux et grandiloquents à l'analyse humble des comportements individuels. L'argumentation entendue est approximativement la suivante : pour qu'une entreprise prospère ou même seulement survive, il faut qu'elle progresse constamment afin de surmonter la concurrence, et pour accomplir ce progrès sans investissement financier excessif, le plus judicieux est de « mobiliser les ressources humaines » ; pour cela, il faut disposer d'individus motivables, prêts à investir toute leur énergie dans le projet commun. Et ce portrait psychologique conduit à préférer les frustrés adeptes de la grève larvée – qui présentent un potentiel de progrès et d'enthousiasme – aux discrets travailleurs, appliqués mais se considérant comme des machines en location. Mettre l'accent sur les perspectives de progrès peut donc aboutir, via l'embauche exclusive d'individus de caractère, à pénaliser la performance actuelle. Et pendant que notre société pérore et sanctifie les tempéraments entiers, pendant qu'elle s'épuise dans les querelles inter-individuelles, les discrètes et hypocrites fourmis japonaises taillent des croupières à nos entreprises...
  L'école, qui s'attache à transformer les silencieux en bavards, les doux en fortes personnalités, facilite peut-être à ses élèves l'insertion en entreprise, mais l'ensemble du phénomène n'obéit pas forcément à une logique économique clairvoyante. Il est même possible que l'école soit le moteur d'un engrenage pervers : en réservant les hauts diplômes à des extravertis, elle précipite ceux-ci à la tête des entreprises, et ces jeunes cadres dynamiques peuvent être tentés de choisir leurs subordonnés sur les critères qui les ont classés, eux, comme supérieurs. Ainsi, le parti-pris de l'école serait la cause et non une conséquence des nouveaux critères d'embauche. Sans pousser l'hypothèse aussi loin, on pourrait suspecter un glissement dans les valeurs communes, qui aurait été suivi par l'école comme par les entreprises, sans que cette mutation soit assurément un facteur de prospérité. En dernier ressort, la justification du combat scolaire contre l'introversion ne serait pas économique.
  Quoi qu'il en soit, il est navrant que des adolescents doux soient blessés, que des adultes discrets et travailleurs soient cantonnés au chômage et à la misère, quand les bavards envahissants et les grincheux sont parallèlement choyés.


II – Actualisation 29 ans après
  A/ L’embauche des caféinées colériques
   (Dans une entreprise à grand majorité féminine,) à une époque vers 2005 où ma chef était une femme, je l’ai entendue dire à propos d’une candidate à embauche qu’elle venait d’interviewer : « elle est bien, cette fille, elle a beaucoup de personnalité », et – connaissant le caractère des collègues majoritaires, cela signifiait « mauvais caractère, grincheux, exigeant toujours davantage de sous et moins de travail ». J’ai demandé « en quoi est-ce une qualité ? » et la chef a rigolé, sans argument, mais persuadée de détenir la raison. A tort je crois. Pour un poste de technicienne de recherche en microbiologie, ça me semblait au contraire un profil déplorable : au lieu du sérieux calme et productif, de la réserve argumentée par écrit dans les conclusions, il s’agissait de préférer les bavardes fières d’elles-mêmes et dominatrices. Mon épouse, femme de ménage, a été l’employée de plusieurs de mes collègues, et elle a été frappée que ce ne sont pas des femmes comme les autres mais des ultra-exigeantes sévères, féroces envers autrui et bienveillantes envers elles-mêmes, nerveuses agitées de manière chronique (effet de l’addiction au café peut-être). Ce n’étaient pas du tout ses employeures préférées, mais ça semblait un profil sélectionné (comme darwiniennement) par l’entreprise où je travaillais (ma sélection à moi ayant été sur d’autres critères : niveau Bac+2 acceptant paye Bac, compétence en programmation informatique Basic Applesoft rare à ce niveau à cette époque).
   Au quotidien, ces personnes étaient certes là (ayant réussi l’embauche) mais n’étaient pas performantes, protestant toujours contre le surplus de travail (logique du monde privé pour augmenter en permanence la productivité), pas lucides (ne comprenant pas mes objections prouvant mathématiquement invalides les normes officielles – même les chefs n’y comprenant rien, sélectionnés pour leur blabla managérial avec niveau zéro en logique pure).
   Finalement, quand j’ai détecté et prouvé les erreurs commises par nos produits, je l’ai signalé, rédigeant l’article scientifique présentant nos excuses expliquées, et on m’a fait taire, étouffant l’affaire. Je l’ai mal vécu alors on m’a viré en « invalidité psychiatrique ». Pour que règne le blabla autosatissfait s’en mettant plein les poches, et tant pis pour les discrets honnêtes ayant tout cassé par la logique honnête, eux étant avec « succès » démolis par loi du plus fort, du plus haut placé dans la hiérarchie, quasi-militaire.
   Que les profs soient alliés à ce mécanisme honteux me semble une autre honte. Ce ne sont plu’ les Japonais qui taillent des croupières (comme dans les années 1990) à nos entreprises mais toute l’Asie, besogneuse discrète, performante. Un basculement civilisationnel semble en cours, et tant mieux si s’écroule ce très mauvais Occident, très menteur en matière de Qualité.
   B/ Le triomphe des menteurs fièrement abrutis
   Par ailleurs, dans les actualités politiques et sociétales, dans mon expérience de la justice, j’ai aperçu des choses tout à fait scandaleuses, mais fièrement auto-proclamées comme supérieures faisant autorité.
   Dans l’affaire du nuage Lubrizol, les « experts » scientifiques ont assuré qu’il n’y avait aucun risque. Sauf que moi, biochimiste subalterne silencieux, j’ai prouvé leur erreur, gravissime. La vraie conclusion n’était pas « la science a prouvé qu’il n’y a aucun risque » mais « la science n’a pas identifié de risque qu’elle connait, en ce qui concerne un risque à ce jour inconnu la science n’en sait rigoureusement rien, ne pouvant nullement garantir zéro risque ». Le bla-bla tonitruant des « gens ayant réussi » (scolairement, socialement) valait vérité même si c’était entière fausseté, grave. C’est comme ça que marche cette société française (et occidentale ?), visiblement.
   Antérieurement, au tribunal philippin, j’avais entendu une psychologue experte donner son avis sur un cas, et son avis était son opinion politique de droite en faveur de la course au fric, sans aucune objectivité, mais cela a été pris par la cour pour Vérité indéniable puisque « scientifique », et le mari pas enrichi a été condamné ! C’est idiot, mais pas relatif à une mauvaise justice dans le tiers-monde : en France, ma femme et moi avons été victimes (condamnés aux dépens dans l’adoption de notre fils) d’une procureure xénophobe, une juge délirante, et l’avocate sachant comment ça se passe nous a déconseillé de faire appel (très long et très cher, presque sans espoir), conseillant de recommencer toute la procédure autrement, ce qui a marché, et prouvé que nous étions dans notre bon droit. Mais dominés, écrasés, par les gens ayant un pouvoir. Toujours en colère nerveux, parlant beaucoup et fort, caféinés, sans honnêteté discrète et minutieuse. Les tempéraments favorisés par l’école sont une calamité.
   Plus tard encore, le président Macron a dit « ceux qui ne croient pas les scientifiques, ce sont des paranoïaques », affirmation catégorique de lui-même classé « super-bon-élève donc très intelligent ». Sans avoir mon expérience que les scientifiques dominants sont majoritairement des escrocs, des menteurs, confondant scientisme idiot et science prudente. Psychiatriser la résistance (à la domination scientiste abusive) faisait penser à la dictature soviétique, internant comme fous les opposants. Et peu après, ce président prétendu libéral s’est avéré le plus autoritaire président jamais vu en ce pays, pour persécuter les non-vaccinés covid osant résister à sa volonté, osant avoir des réflexions prouvant mauvaise sa croyance. (On ne sait pas où bout de 2 ans la létalité à 5 ans d’un remède, autrefois toujours requise, à démontrer pour autorisation normalement, avant même d'énoncer officiellement le "principe de précaution"). La première dame de France jubile : ancienne prof, elle voit triompher le beau-parleur qu’est son mari, ex-élève, clamant haut et fort n’importe quoi, même faux illogique ; il faut « participer », dominer oralement. Moi je dis que c’est une honte, un des contraires de l’intelligence humaine, une forme bestiale (simiesque ?) de domination (comme beugle le gorille dominant ?).
   De même encore : triomphe la jeune écologiste militante, haranguant les foules pour partager son catastrophisme (de l’humanité allant mourir de son CO2, assurément), quand doucement, crayon en main et bouche fermée, j’ai prouvé que la preuve de causalité du CO2 humain pour le réchauffement climatique est une faute méthodologique, un faux en écriture, une affirmation scientiste pas du tout scientifique… Mais non, pour les profs modernes, ce qui compte, c’est le bla-bla, aucunement le sérieux et la pertinence, c’est affligeant, c’est grave (vues les milliers de milliards d’euros dépensés à tort, le défaitisme presque pathologique des jeunes inquiétés abusivement – non que le réchauffement climatique soit une erreur, mais la responsabilité du CO2 humain, pas abaissé drastiquement, est un malentendu ayant refusé de réfléchir).
   J’ai entendu aussi dire que le nouveau Bac aurait la moitié de ses points attribués dans un grand oral sans sujet précis. Comme si blablater sur n’importe quoi était la moitié de la valeur d’un jeune, sans le juger sur sa logique, sa compétence, son sérieux. Je trouve ça affreux, mais officiellement exigé maintenant, horreur.
   Inversement, j’avais vu en entreprise la création de postes cadres d’experts sans fonction managériale, efficaces en expertise sans exiger épuisement en conflits inter-individuels. De tels postes sont idéaux pour des introvertis brillants, que l’école aurait eu tort de condamner comme inadaptés au monde du travail.
   Il y a une telle unanimité chez les professeurs modernes que la faute de raisonnement semble imputable aux professeurs de professeurs, ou éminences prétendues en pédagogie. Ça n’excuse rien. Et je plains les jeunes victimes de cette injustice, totale, maintenant comme hier (pas avant-hier, me semblant mieux avec son idéal d'enfant sage – plutôt que bavard).

* Ajout 01/02/2022 : violence, oui
   La télévision, après le suicide en France d’un 10e policier cette année, annonce qu’en prévention de ce suicide des policiers, vont être embauchés une centaine de psychologues, pour libérer la parole donc sauver les suicidaires. Et j’avais entendu cette même expression « libération de la parole » à propos du mouvement Me Too, mouvement féministe dénonçant les hommes dits tous violeurs (et les femmes s‘affirmant toutes des victimes). Dans les deux cas, le principe est je crois d’affirmer que les humains névrosent pathologiquement s’ils gardent à l’intérieur leur mal-être, et tout s’arrange si cela sort, est exprimé. Il semble que ce soit la même théorie qui commande l’école moderne (ou postmoderne après 1968) dans son exhortation à la participation orale : il est considéré que le silence est douleur et l’enseignant doit « aider » les enfants à s’extérioriser, même contre leur gré, façon « injonction de soin ».
   Je ne suis pas du tout d’accord sur l’universalisation de cela : peut-être que 5% des silencieux sont des bavards souffrant de leur silence (comme : peut-être que 5% des garçons veulent tuer leur père pour coucher avec leur mère, et pas 100 ,0%±0,0% selon le délirant Sigmund Freud, attribuant toute objection au « déni coupable prouvant qu’il a raison »). Mais avoir généralisé est une faute logique : l’induction. Les sciences humaines, échouant à prédire, sont jalouses des sciences dures et font semblant d’être aussi universelles, en oubliant simplement qu’il manque l’étape de mise en doute et validation. Même s’il y a quelques extravertis refoulés en introvertis déchirés, il peut parfaitement y avoir des introvertis équilibrés, très mal à l’aise vis-à-vis d’une extraversion forcée (sans du tout de « bonne extraversion universelle »). De manière moins théorique, j’en ai l’expérience pratique : alors que depuis 19 ans je songeais tous les jours au suicide, je suis passé à l’acte à 34 ans et demi quand j’ai été obligé (par celle que j’aimais) à aller voir un psy, à parler, dire et dire encore. Dans mon cas, c’était tueur, au contraire de sauveur, oui elle m’a tué, en s’affirmant généreuse, affreusement, bêtement. La pression à l’école (envers la participation orale) est moins grave mais relève du même abus.
   C’est une vaste erreur épistémologique, avec un nombre immense de victimes, bousculées à tort. Forcer un timide réservé à s’extérioriser s’apparente selon moi à une forme de viol. (Le désapprouver dans sa réserve silencieuse serait une tentative de viol, inaboutie mais traumatisante vis la culpabilisation, dévalorisation).

* Ajout 12/06/2022 : focus Me Too
   Mon ami contradicteur habituel me répond par un complément personnel : « Pour Me Too, même si je ne nie pas qu’il y ait des problèmes spécifiques aux femmes, ce côté proscription de Sylla me déplait souverainement. Je suis un partisan forcené de la présomption d’innocence. » Qu’est-ce que j’en pense ?
   Euh, j’avoue humblement que je n’avais jamais entendu parler de Sylla ni entendu le mot « proscription » (seulement prescription médicale). Je demande à Google qui me répond : « La première proscription eut lieu en ~ 82. Elle fut décidée par Sylla, qui venait de s'emparer de Rome, et visait les partisans de Marius. Cinq cents "ennemis de la patrie" furent désignés. N'importe quel particulier pouvait les exécuter et gagner douze mille deniers par tête rapportée. » et « Une proscription est une condamnation arbitraire annoncée par voie d'affiches, et qui donne licence à quiconque de tuer les personnes dont les noms sont affichés. L'exécutant reçoit une récompense, en général une partie du patrimoine du proscrit. ». Oula, oui, ça fait peur et semble incarner l’injustice, la condamnation abusive à mort, sans écouter de défense ni envisager la moindre erreur. Le rapport entre cette horreur atroce et Me Too constitue une opinion, d’accord pour l’envisager, sans affirmation catégorique. J’ai entendu des propos journalistiques, après le récent acquittement de policiers accusés de viol par une plaignante et les protestations des féministes extrémistes Alice Coffin et Sandrine Rousseau (quelque chose comme « femmes victimes, nous on vous croira toujours ! »), que l’esprit Me Too entrainait une sexiste présomption de culpabilité envers les hommes car hommes. Cela me parait une remarque hélas pertinente, et je donne en cela tort aux ultra-féministes. Ce n’est pas parce qu’une personne qui porte plainte est une femme qu’il est impossible « par nature » que ses accusations soient délirantes, croyant à ses fantasmes, parfois, chez certaines (comme cela arrive chez certains hommes, pareillement). Dans d’autres cas, c’est seulement « faute de preuve » qu’il y a acquittement, tandis que les faits dénoncés ont effectivement eu lieu, tout me parait possible. Mais généraliser totalement en fonction du sexe n’en est pas moins du sexisme forcené, le contraire d’un combat sincère contre le sexisme. Bref, quelle est mon opinion quand c’est parole contre parole, sans preuve, une femme accusant un homme de l’avoir violée ? Ma réponse n’est pas la présomption de culpabilité de l’homme (façon féministe) ni d’innocence de l’homme (façon patriarcale ou plaçant la présomption d’innocence comme principe premier), j’avoue que « je ne sais pas ». Je ne pourrais pas être juré dans un tel procès. Ni un autre d’ailleurs, car les prétendues preuves scientifiques, je n’y crois pas non plu’, les croire étant spécifique à l’idéologie scientiste (clamant que La Science actuelle dit le Vrai indéniable) que j’ai montré contradictoire puisqu’antiscientifique (démentie par l’expérience, avec les changements de lois dites prouvées avant d’être démenties). Oui, j’en reste à mon scepticisme « je ne sais pas », là comme presque partout ou presque. Enfin, si on m’accuse moi-même de viol, je démentirai avec véhémence, mais ce n’est pas un « savoir » non plu’ : rien dans mes souvenirs se rapproche de quelque chose comme ça, mais si je suis actuellement en train de rêver, ce monde-ci est illusoire et j’ignore totalement, vu d’ici, qui je suis dans le monde dit vrai (s’il existe)… : peut-être un tigre ou un caillou ou un violeur, tout est imaginable, rien ne semble sûr.

* Ajout 30/01/2023 : semi-discussion
   Mon ami contradicteur répond tardivement à mon ajout précédent : « on pourrait être d’accord sauf que, comme d’habitude, tu restes dans des contradictions. On est pour "me too" ou on est contre. C’est comme la peine de mort. »
   Je réponds :
- Non, ce n’est pas être en tort, s’auto-contredire absurdement, que de percevoir sans trancher les deux argumentaires opposés, tous deux judicieux d’une certaine façon sans que l’un soit à jeter comme nul. Et s’il y avait un référendum pour ou contre la peine de mort, effectivement je voterais « je ne sais pas » (si c’est proposé, ou bulletin blanc sinon, ce qui revient au même).
- Avant, quand la loi (ou loi implicite pour Me Too) était dans un sens, je ne hurlais pas au scandale, ayant simplement conscience d’une injustice partielle, mais sachant que la corriger déboucherait sur une injustice inverse, pas idéale non plu’. Ensuite, après basculement de l’autre côté, je ne hurle pas non plu’ au scandale, ayant conscience de la même situation, simplement de l’autre côté. Mon ami, apparemment fanatique n’imaginant pas des opinions modérées, ne songe pas à cela comme possible, et il exige dictatorialement un oui ou bien un non. Je refuse franchement cette injonction dictatoriale, là (ou la pseudo-loi entendue à la télé en politique : « il faut choisir, il faut s’engager, le vote blanc est très idiot »). J’ai écrit un site entier pour justifier mes votes blancs (voteBlc.htm), je ne vais pas tout répéter ici, en tout cas il est faux d’affirmer qu’il s’agit d’autocontradiction.
- Contrairement à la génération de mes parents, je n’ai pas été formé au lycée à un protocole d’écriture formalisé, mais cela nous était indirectement conseillé de manière informelle : thèse/antithèse/synthèse (du moins : ce qui s’appelait ainsi autrefois, je crois), autrement dit A/non-A/conclusion personnelle. Mais absolument jamais il ne nous a été affirmé que la conclusion était soit l’adhésion à A, soit à non-A, au contraire le + souvent j’expliquais que A était plaisant puis déplaisant, non-A était plaisant puis déplaisant, et ma conclusion pouvait être intermédiaire, refusant tout à la fois A et non-A bruts, cherchant une voie intermédiaire ou assortissant la voie en usage d’immenses réserves désapprobatrices. Mon ami semble n’avoir rien compris à cela, restant à un manichéisme simpliste : Le Bien contre Le Mal. Je ne suis pas d’accord, et la réflexion intellectuelle me semble tout le contraire de cela. Et je ne parle pas de bla-bla érudit (façon scolaire lycéenne) faisant semblant de réfléchir pour se faire admirer personnellement, je parle d’examen de vraies questions, de justice ou injustice, graves.

* Ajout 29/05/2023 : Suite
   Mon ami contradicteur habituel répond à mon ajout du 30/01/2023 : « 1/ Toujours la même chose : les contraires ne te gênent pas. C’est d’autant plus surprenant compte tenu de ton génie en sciences dures. 2/ Je suis en effet un fanatique : le fanatique de la liberté. Je n’admets pas les présomptions de culpabilité. C’est la porte ouverte à tous les totalitarismes. On a vu ce que ça a donné avec l’affaire Outreau et même puisque je suis à Toulouse : l’affaire Baudis. N’importe qui va accuser n’importe qui de n’importe quoi et aura raison puisqu’ il accuse. Nous reculons de trois siècles. Si c’est ce que tu veux, libre à toi mais ne compte pas sur moi pour te suivre sur ce terrain. »
   Je réponds :
1/ Non, cela n’a rien de surprenant, au contraire. Compte tenu de mes facilités en logique, j’avais des bonnes notes en sciences dures, mais au lieu de pervertir cela en affirmation catégorique (en fait abusive) je reste lucide dubitatif, ce qui est effectivement la conclusion logique, souvent.
2/ J’ai entendu que bon nombre de magistrats jugeaient que « la normalité doit être la liberté et l’exception : la prison ». Résultat de cette prodigieuse générosité : Monsieur B.A., toujours pas incarcéré de toute sa vie (puisqu’il a eu une enfance malheureuse, le pauvre), vient de violer et tuer sa quatorzième victime, vive la liberté ! Euh, je trouve que ça mérite au moins débat, sans fanatisme. Qui plus est, l’accusation était mensongère me concernant : je ne disais nullement que je suis à 100% pour la présomption de culpabilité et 0% pour la présomption d’innocence, j’envisageais tout au contraire que les deux présomptions contradictoires aient chacune de bonnes raisons apparentes, donc à débattre. La preuve que je ne suis pas avec Me Too à 100% pour la présomption de culpabilité, c’est que j’ai jugé éminemment suspecte la plaignante contre Depardieu pour viol racontant que, quand il lui avait demandé de se déshabiller, elle s’était déshabillée, quand il lui avait demandé d’écarter les cuisses, elle l’avait fait, mais l’acte finalement n’avait pas été plaisant alors elle portait plainte pour viol… non, dans ce cas, je n’étais pas à 100% pour la présomption de culpabilité envers Depardieu, pas du tout. De même, l’expérience de la Justice française que j’ai (au sujet de l’adoption de mon fils) me fait douter non seulement préventivement des culpabilités mais a posteriori après jugements, qui sont souvent arbitraires idiots tyranniques menteurs.
3/ Je persiste à penser que mon ami n’a rien de rien compris à l’affaire thèse/antithèse/synthèse. Cela est parfaitement opérant dans les sujets non-binaires où ni thèse ni antithèse ne sont satisfaisants d’où besoin d’une conclusion tordue ou composite, c’est même la majorité des cas, sauf cas simpliste évidemment.