I / DÉMOLITION RÉALISTE
II / DÉMOLITION DU RÉALISME
III/ Incohérence personnelle
Introduction
Dans mon E-livre (impubliable) "Echapper à la dictature réaliste. Légitimité logique et morale de 2 formes de fuite", je partais du problème logique (principe) du Réel avant d'aborder le problème moral (pratique). C'est logiquement fondé, mais le fait que ma démonstration initiale me fasse, en pratique, classer "malade mental" évite aux personnages qui me condamnent d'affronter la sérieuse remise en question morale, dont une partie est pourtant indépendante. Je reprends donc ici la question en sens inverse: morale surtout, puis logique en prenant du recul.
Je présente une nouvelle approche, repensée, expliquant ma position à un ancien ami d'enfance retrouvé père de famille, cinéaste animalier, refusant d'entrer dans une église.
I/ DÉMOLITION RÉALISTE
a)
Le commencement
La glorieuse statue de la "Liberté", à l'entrée du port de New York, s'accompagne d'un questionnaire où les touristes étrangers doivent spécifier quelle est leur religion – une absence de religion n'étant pas complètement criminelle mais très suspecte de sympathies communistes, une religion musulmane étant très suspecte de projets terroristes. Les USA maîtres du Monde se battent ouvertement pour faire régner l'Ancien Testament biblique (celui qui commande l'adoration religieuse et donne Israël aux Juifs, pas le Nouveau Testament qui condamne la richesse non partagée et le tribalisme/nationalisme…), c'est donc le point de départ dominant. Le commencement de notre monde serait la Genèse, par le Dieu universel.
D'abord, un Adam humain créé à Son image, immortel et seul sur Terre, avec mission d'asservir la Nature, dominer les animaux. Puis lui est adjoint une compagne, Ève, mais celle-ci commet le pêché en mangeant le fruit interdit de la connaissance du Bien et du Mal, entraînant Adam à la suivre; Dieu applique alors la condamnation à mort qu'Il leur avait annoncée dans ce cas et ils vieillissent, meurent. Leurs enfants, portant ce pêché, sont mortels aussi, mauvais dès la naissance. Les femmes, portant en plus le crime de Ève, doivent en punition enfanter dans la douleur et être dominées par les hommes. Après quelques générations, Dieu regrette sa Création et extermine les humains, nouveaux-nés et fœtus compris, épargnant la famille de Noé. Il demande aux mâles de celle-ci, bénis, de remplir la Terre d'enfants, devant devenir pour chaque animal un sujet de crainte et effroi. Dieu choisit ensuite de s'allier spécifiquement à la descendance de Sem (sémites) via Abraham, destinée à dominer les nations et… j'arrête, je n'en peux plus.
Ce Créateur paraît effroyable, déclarant des innocents nouveaux-nés "coupables" et les exterminant de façon hitlérienne… pourquoi n'a-t-Il pas utilisé sa toute puissance pour corriger la copie et remettre les compteurs à zéro à chaque génération, en ajustant le mécanisme embryonnaire? Comment cette intelligence infinie n'a-t-elle même pas conscience qu'en plus de l'hérédité, l'environnement personnel et l'enchaînement des sentiments déterminent la personnalité (un enfant de salaud pouvant devenir un ange et vice versa)? Pour une toute petite victime de la "mort subite du nourrisson", en quoi s'applique l'idée que l'être humain est mortel car mauvais, sachant que ce petit légume n'a pas du tout eu le temps de faire de mauvaises choses? Par ailleurs, il paraît choquant de faire preuve de machisme éternel, de mépris raciste envers certaines lignées non élues, suscitant la jalousie, la guerre, la Shoah... Et pourquoi Adam a-t-il été créé avec des testicules avant de décider de lui inventer une épouse? Pourquoi serait-il criminel de "savoir où est le mal afin de ne pas le commettre"? (un microcéphale décérébré attaquant sans retenue sa petite sœur pour la manger était-il le genre d'attitude voulue par Dieu?) Si le Mal n'existait pas au départ, en dehors de cette interdiction (de lucidité), pourquoi l'avoir formulée en inventant le Mal? Et Dieu refuse-t-il le libre arbitre humain, comme Staline exigeant sous peine de mort d'être obéi et adoré par des pions dénués de sens critique? Dieu ne serait pas un père bienveillant mais le pire des dictateurs, et l'être humain à Son image serait évidemment un dominateur meurtrier, il fallait être aveugle pour ne pas l'avoir entrevu dès le départ, et cela ne justifie objectivement aucune adoration, tout au plus de la crainte. Libre aux croyants de se soûler de litanies, jugeant sans débat que ces paroles constituent La Vérité, mais elles ne sont aucunement convainquantes. Cela ressemble plutôt à un mauvais roman écrit par certains sémites dominateurs, racistes et misogynes, imaginant un Créateur à leur image, pour se justifier en sacralisant leurs penchants les plus contestables – le pire crime étant évidemment l'esprit critique, décelant le Mal dans le prétendu Bien... Navrant. Le Nouveau Testament biblique n'est, lui, pas inintéressant, corrigeant certains points choquants (la Parabole du Bon Samaritain dit qu'un individu peut s'avérer estimable quelle que soit sa famille, qu'un religieux bien-né peut s'avérer méprisable) mais, pour être convainquant, Jésus-Christ aurait dû clairement mettre à la poubelle l'Ancien Testament au lieu de déclarer qu'il constituait La Loi pour l'Humanité.
En Europe, le point de départ enseigné comme vrai est différent: il s'agit du roman cosmologique formulé par les scientistes (au sens français du terme, non au sens américain qui veut dire "scientifiques", incluant peut-être des athées matérialistes mais aussi de fervents judéo-chrétiens tenant la Genèse pour vraie). Le Big Bang serait la source de tout, l'Univers en se dilatant faisant naître de proche en proche la Matière, le Soleil, la Terre, la vie, des animaux, des mammifères, des singes, l'espèce humaine. L'être humain serait un animal particulier, seul porteur de l'intelligence proprement dite, source de performances extraordinaires. Pourquoi pas? Avant de rejeter ce roman lui aussi, voyons où il mène pour tenter de comprendre le monde vécu.
b)
Logiques sociales
A moins de vivre en ermite, en cultivant ses légumes seul sur une île déserte, l'être humain vit en société.
On nous raconte que les fourmis aussi vivent en sociétés, mais qu'elles sont totalement focalisées, instinctivement, sur leurs tâches pour la fourmilière, sans aucun recul, aucune conscience autonome.
D'autres espèces animales, mammifères plus proches de nous, vivent en groupes tout en étant paraît-il totalement égoïstes, faisant régner la loi du plus fort. Le plus fort prend la nourriture, se reproduit, tandis que les faibles sont écrasés, faméliques, privés de reproduction – ils aspirent seulement à prendre la place des forts, pour faire pareil à leur place, et tentent parfois leur chance par l'agression violente.
Les sociétés humaines, elles, semblent un compromis sensé entre ces deux extrêmes: la coopération sociale est approuvée par les individus autonomes, chacun comptant obtenir par ce moyen un confort amélioré pour lui-même.
La voie chrétienne (dans sa lecture laïque) est pertinente: si chacun, naturellement égoïste, s'efforce d' "aimer autrui comme lui-même", il recevra autant qu'il donnera, et en évitant de brimer les faibles, il évitera l'inconfort (ou danger) d'affronter leur colère, tandis que spécialisation et partage des tâches centupleront le rendement, le confort matériel de tous, dont lui-même.
La liberté bouddhiste est pertinente aussi, équilibrant ce mécanisme: si quelques uns, libérés des besoins matériels et tentations (par l'indifférence ou la méditation), préfèrent le repos et l'extinction aux trépidations face à l'adversité, ils s'éteindront sans gêner.
c)
Logiques familiales
La logique sociale justifierait une société harmonieuse pour des individus éternels à but purement égoïste, mais la situation humaine est plus proche de l'animalité: les bébés humains naissent immatures, inaptes à survivre seuls, la plupart des adolescents ont envie de s'accoupler, puis vieillissent et meurent.
La passion amoureuse et la pulsion sexuelle semblent instinctives, subies comme l'envie d'uriner ou de dormir, ce n'est généralement pas le fruit d'une décision réfléchie visant à un projet de reproduction. Sauf exception rare, le besoin égoïste d'auto-satisfaction pousse donc à un besoin de l'autre qui est ciblé, en tant qu'objet adoré.
Selon les scientifiques, les actes sexuels conduisent matériellement aux grossesses, enfantements, et comme chez les mammifères animaux, l'instinct pousse spontanément les parents humains à aider leurs bébés. Il semble que ces bébés soient considérés par les parents comme étant une part d'eux-mêmes, ou un objet d'adoration. S'ajoute à cela, semble-t-il, un calcul sensé : le retour vient ensuite, les personnes âgées impotentes étant assistées par leurs enfants reconnaissants ou assidûment éduqués à la responsabilité familiale (l'éducation étant au départ un conditionnement anti-égoïste, par félicitation/condamnation et récompense/punition, qui conduit égoïstement à préférer la carotte au bâton, en allant dans la direction commandée, obéissante ou altruiste).
En un sens, chaque fourmilière est ainsi une famille, et les fourmilières en compétition sur une territoire se font une guerre totale, avec héroïsme suicidaire de soldats, soutien inconditionnel derrière. Chaque fourmi se comporte comme une cellule du corps humain, et chaque fourmilière: comme un individu égoïste.
Les humains tempèrent cette tendance égoïste, variante groupiste, par la logique sociale encore: les familles coopèrent pour former des tribus, puis – quand les moyens de transports raccourcissent les distances – des nations, et (théoriquement) une Humanité unie, "mondialisée".
d)
Le problème politique
La coopération à bénéfice réciproque semble un équilibre précaire. Il n'est pas satisfaisant égoïstement de donner davantage que l'on ne reçoit, de voir d'autres recevoir davantage que soi. Les différences naturelles entre paresseux et bosseurs font que l'égalité (même réconfort pour chacun) n'est pas l'équité (même ratio réconfort/effort pour chacun). De plus, égoïstement, chacun tend à vouloir pour lui-même (ou sa famille) le maximum de réconfort et le minimum d'effort, même si c'est aux dépens d'autrui (ou des autres familles) – c'est le principe de l'inéquité, de l'injustice.
Les familles aristocrates dominantes sont une longue tradition historique, tirant un luxe oisif du rude labeur des familles humbles, en reversant une partie des réquisitions aux oppresseurs armés et aux guides spirituels aidant les pauvres travailleurs à supporter cela sans révolte. Il s'en est suivi la révolution française et l'extermination partielle des aristocrates, l'anticléricalisme. La démocratie était née, au profit de la majorité des individus, plutôt que d'une minorité privilégiée. La démocratie avait été décrite auparavant dans des cités grecques antiques, mais c'était une aristocratie déguisée, les électeurs oisifs faisant trimer des masses d'esclaves sous peine de mort. La démocratie moderne s'avéra aussi un jeu de mots: le nationalisme agressif conduisit à envahir les pays lointains, asservir les peuples sans droit de vote. Aujourd'hui, les pays "développés" exploitent très durement les pays à monnaie faible, en combattant l'immigration qui équilibrerait les disparités. C'est compréhensible en tant qu'acte d'égoïsme groupiste, aristocratique, mais puisque cela se fait au nom des valeurs démocratiques et chrétiennes, il y a mensonge patent.
Les familles riches sont une autre tradition, voisine si ce n'est que chacun peut théoriquement devenir riche. Les héritiers détenant le capital (protégé par la police et l'armée) tirent tout le profit du rude travail effectué par d'autres, payés misérablement (par enchères décroissantes par exemple). Il s'en est suivi les révolutions communistes et l'extermination des possédants. Mais cela déboucha sur la faillite soviétique: la solidarité ne partageait qu'une misère – le travail n'étant pratiquement plus effectué (qu'à l'extrême minimum, sous la menace) car aucunement assorti de prime personnelle à l'effort, la sévère éducation politique à servir le bien égalitaire étant d'autant moins crédible que les décideurs et leurs relais ne pouvaient s'empêcher de profiter du pouvoir pour s'accorder des privilèges.
La promesse, discrètement égoïste, d'une vie post-mortem comme suprême récompense (invérifiable) de la vertu altruiste a donné lieu à une utopie crédible. Mais cette voie chrétienne a été détournée, retournée par les dominants, avec l'approbation des humbles candidats à la domination: il est "juste" de massacrer/piller les infidèles, de chasser/asservir les peuples non mentionnés dans les textes sacrés, il est "bon" de payer un minimum les producteurs et vendre le plus cher possible aux acheteurs, le suivi assidu des rites religieux fait que tout sera pardonné.
e)
Envisager notre pauvreté ?
Frugalité et partage ne sont pas naturels, pas plaisants spontanément, mais ce pourrait être un sage calcul pour prévenir la violence, sans même invoquer de récompense post mortem. Qui plus est, se dévouer pour des faibles comme les bébés et impotents, en s'oubliant apparemment, apporte une élévation dans l'estime de soi-même, conditionnée par les leçons altruistes – ce qui flatte l'ego. Et dans la relation réciproque avec autrui, mieux vaut le cercle "vertueux" (plus je t'aime plus tu m'aimes, et plus tu m'aimes plus je t'aime, etc.) que le cercle "vicieux" (plus je te déteste plus tu me détestes, et plus tu me détestes plus je te déteste, etc.).
En pratique, cette voie raisonnable paraît toutefois complètement utopique. Les dominants veulent dominer, quitte à tuer parfois, et la plupart des misérables dominés veulent devenir dominants et opulents, plutôt que vivre une paix frugale. Le Loto (ou jeu de gain similaire), immensément populaire (même après éducation communiste ou chrétienne), incarne cette soif du "miracle" que serait le luxe sans mérite particulier et sans plus d'effort personnel. Le nationalisme asymétrique est aussi très populaire dans les pays riches: les délocalisations de richesses sont combattues tout en accueillant avec joie les produits lointains payés misérablement.
Le fait que les usines partent en Asie pourrait conduire à un effondrement ici, un équilibrage, mais il est à craindre que les occidentaux restent en position de tribu dominante par la finance et le contrôle de la parole dirigeante, ce qui pourrait aboutir à une révolution mondiale, voire une extermination comme la Shoah, retournant la logique de favorisation tribale en haine tribale opposée. C'est se tromper de colère, ne pas voir que (en plus de tuer des nouveaux-nés innocents et certains individus relativement pauvres) de nouveaux riches feront naturellement pareil que ceux qui ont été massacrés.
Mais le déséquilibre militaire est tel que ce n'est pas la menace principale, le terrorisme étant plus vraisemblable, attaquant les vulnérables familles des électeurs de nations dominantes. Pour l'instant, ce mécanisme n'est à l'œuvre qu'avec les Musulmans, assidûment brimés par les décideurs occidentaux prosémites, approuvés démocratiquement, mais il pourrait se généraliser à la majorité du Monde, avec des pauvres désespérés à la place des religieux fanatiques.
Le confort matériel, non partagé avec les méritants, vaut-il le prix de ces horreurs bien au delà de l'inconfort? Il devrait être permis de poser la question, aux prétendus chrétiens avides de richesse personnelle, aux prétendus démocrates disant discrètement merde à la majorité du Monde, aux prétendus intellectuels sacralisant le prosémitisme plutôt que dissuadant du racisme.
f)
Envisager l'équité ?
Si l'Occident défendait le principe démocratique, le choix majoritaire respectant chacun, opposé au nazisme nationaliste et raciste, opposé à l'aristocratie des plus fortes familles, il remplacerait l'ONU qu'il domine par un mécanisme basé sur la démographie, la majorité des humains décidant. Cela est totalement exclu, pas même envisagé, et j'en conclus que les prétentions à la vertu démocratique sont des mensonges patents. La démocratie israélienne interdisant le retour des expulsés palestiniens n'est qu'un peu plus ouvertement inéquitable.
En démocratie digne de ce nom, le référendum d'initiative populaire mettrait fin à "l'oligarchie soumise à désaveu démocratique périodique", obligeant les dominants à se soumettre effectivement aux choix majoritaires, sans se succéder alternativement pour faire ce qu'ils veulent. Les lobbies minoritaires perdraient leur puissance liée au contrôle des "élites" méprisant les peuples.
Une démocratie mondiale aurait évidemment des échelons régionaux, locaux, pouvant appliquer des spécificités bénignes, sans heurter les valeurs majoritaires – si la majorité des Rwandais veut massacrer telle ethnie ou la traîner en esclavage, elle ne pourrait en décider par elle-même. Israël déciderait démocratiquement ce qu'il veut, le Moyen-Orient casserait démocratiquement ce jugement, et le tout serait arbitré démocratiquement par le Monde à majorité asiatique. Ce serait un autre monde, démocratiquement équitable, sans domination israélo-américaine.
La propriété antique d'Israël par les Israélites pouvant légitimement être invoquée dans les débats, les Etats-Uniens seraient expulsés si les Palestiniens le sont, équitablement. Et si les Israéliens entendent régner sur Israël tout en daignant accepter une Palestine en Cisjordanie et bande de Gaza, les Etats-Unis seront rendus aux amérindiens survivants (là où ailleurs) en prenant 95% des côtes (New York, Floride, Californie, Texas, Alaska etc.), tout en accordant aux blancs et noirs les Dakotas Unis avec à distance la bande de Géorgie. Si c'est totalement exclu, les crimes antiques étant amnistiés, les Palestiniens ne seraient plus chassés, parqués.
La bombe atomique serait légitimement interdite aux Irakiens et Iraniens, mais elle le serait tout autant aux Israéliens, Américains, Français etc. seul le gouvernement mondial méritant de posséder la menace suprême contre les entorses guerrières au bien de la majorité mondiale.
Loin de cette
géopolitique, des règles
politiques/sociales pourraient à la base éviter les inégalités financières imméritées. L'enrichissement commercial serait obligatoirement à partager avec les producteurs/fournisseurs, le bénéfice bancaire: avec les emprunteurs. Inversement, pour éviter la paresse fruit du partage égalitaire, la rétribution serait individualiste : récompense du rendement, de l'invention utile, du travail pénible non automatisable, sans transmission à la descendance pour éviter l'oisiveté provoquante de riches héritiers. Le Monde ne connaîtrait plus l'opulence de minorités travaillant moins en gagnant davantage, ni la haine qui en découle. Ce serait une voie mondialiste individualiste, très différente des standards passés et actuels (nationalistes/communautaristes ou communistes, capitalistes ou égalitaires). La frugalité serait le standard, adoucie par la performance personnelle. Serait-ce là un moteur suffisant pour susciter l'effort, l'amélioration continue?
g)
Impasse
Le principe démocratique paraît utopiste, supputant que la majorité des humains veut satisfaire la majorité des humains. Même si c'était le cas (et non le "chacun pour soi" qui semble secrètement majoritaire), le gouvernement par les plus nombreux pourrait décider d'exterminer les minorités, les opposants, proscrire la liberté de pensée. Il paraît que l'Histoire l'a démontré localement, et c'est envisageable pareillement à l'échelle d'une humanité unie sans plus de domination tribale.
Cela conduit à craindre que l'injustice ou violence égoïstes, groupistes, soient naturelles pour l'espèce humaine. Elle ne sont pas universelles mais les anormaux qui ont d'autres valeurs, naïves et non-violentes, sont par nature écrasés. Le reste n'est qu'un jeu de rôles, une parodie théâtrale de vertu, jouant sur de pseudo-valeurs désintéressées comme le patriotisme ou le respect fervent envers un Créateur.
A l'échelle de ce qui fait le monde, politique ou géopolitique, tout ne semble que mensonge, débile (dénué d'auto-critique) ou machiavélique. Il n'y a qu'à l'échelle individuelle que quelques anormaux tentent l'impossible, à titre de contribution minuscule, sans espoir d'enrayer les guerres. Bien sûr, ce n'est pas une dichotomie entre bons et mauvais, égoïstes et altruistes – les altruistes se font plaisir en un sens, et tout un dégradé de nuances évolutives forment le tableau: des riches esclavagistes donnent l'aumône ou deviennent de généreux vieillards craignant le Jugement, des exilés volontaires partis partager la misère reviennent manger grassement en prétendant prêcher le partage.
Si l'égoïsme (personnel ou groupiste) était assumé, il y aurait honnêteté, cohérence, dans l'inéquité revendiquée comme saine ou sacrée. Mais cela interdirait de protester à l'injustice, à l'inéquité, quand on est du côté des victimes, or… protester, invoquer la justice, est un jeu de rôle très efficace, automatiquement choisi par l'egoïsme, passant temporairement l'habit altruiste. Déguisement.
L'honnêteté intellectuelle est en tout cas rarissime, surhumaine peut-être mais en tout cas anormale et inconfortable, donc en un sens "pathologique".
II/ DÉMOLITION DU RÉALISME
La description d'une perception de ce monde peut avoir une certaine logique, mais avec davantage de recul, il convient de se demander si, en amont, le choix de s'attacher à ce monde est vraiment logique.
a)
Le problème
Il se trouve que j'ai dans mes souvenirs des mondes totalement incohérents avec le présent, compte tenu des régularités admises par l'expérience – au sein du monde présent, étayé de la plupart des souvenirs, constituant ce qu'on nomme la Réalité, le reste étant dit Rêves ou illusions oniriques.
Le problème est le suivant: comment savoir que le monde présent n'est pas un de ces mondes imaginaires qui va s'évaporer pour retomber sur une Réalité apparente?
Quantité de recettes ont été formulées en Occident, affirmant que la Réalité se distingue par ceci ou cela, mais si ces recettes sont formulées au sein d'un rêve, par des personnages imaginaires, leur crédibilité et leurs "preuves" sont nulles, elles peuvent être contredites par un réveil. Sauf exception (Bernard d'Espagnat?), les scientifiques oublient qu'ils travaillent en aval de l'hypothèse de Réalité, et en excluant arbitrairement l'hypothèse que les régularités passées et apparences cohérentes peuvent s'éteindre si le possible créateur de ce monde (Dieu ou partie de moi qui rêve) en décide ainsi. Quant au fait de voir un personnage proche cauchemarder en se débattant dans son sommeil contre des monstres non présents, il n'apporte aucune preuve, puisque ce spectacle d'agitation sans fondement peut parfaitement faire partie d'un de mes rêves.
Honnêtement, sans diktat interdisant arbitrairement l'objection, l'hypothèse du "rêve présent possible" n'est pas invalidable. Et la notion de Réalité n'est elle-même qu'une saveur suspecte du vécu, l'univers pouvant être un changement de mondes éternel, marqué par l'amnésie et l'invention involontaire de souvenirs. A la question "et d'où viendrait le Monde?" la réponse serait simplement "il n'y a pas plus de réponse accessible qu'à l'origine du Big Bang ou de Dieu". Toutefois, le doute peut être abusif, égaré (à partir d'une possible Réalité suivie) par l'expérience du rêve faussant les perceptions. Rien n'est sûr, même si une foi aveugle peut conduire à affirmer des certitudes absolues, dans un sens ou un autre.
Ceci compris, il n'en reste pas moins que ce monde est marqué par des personnages humains ressemblant à celui ("moi") d'où émergent les images, douleurs et mouvements volontaires. Certains sont adorables comme des objets tentants, presque tous font preuve d'une certaine logique, mixant égoïsme et altruisme, suggérant de respecter leur ego apparent – le plus intuitif est d'adopter conventionnellement l'hypothèse réaliste, selon laquelle il s'agirait d'alter ego dans la même position que moi.
b)
Le scandale psychiatrique
Sous hypothèse de Réalité: si autrui est un alter ego, il est dans l'impossibilité de
savoir s'il rêve, ne pouvant que le
supposer ou y
croire. Si Monsieur X exprime son incapacité à savoir s'il rêve, je ne peux que le comprendre même s'il a tort: je ne suis pas qu'une image disparaissant quand X regarde ailleurs, mais X ne peut pas le savoir, et de mon point de vue, le personnage de X peut cesser d'exister si je tourne la tête (un miroir ou une caméra ne prouveraient rien, puisque je peux rêver pareillement les images que ces outils semblent restituer objectivement). Toutefois, si X exprime être libre de faire égoïstement n'importe quoi sans conséquence fâcheuse puisqu'il est dans un rêve temporaire, il y a danger : les mécanismes de ce monde peuvent aboutir à de grandes douleurs ou horreurs pour moi et les autres personnages, que ceci soit réel ou cauchemardesque n'y changeant rien. Il est donc prudent d'interdire cet égoïsme sans frein, de menacer immédiatement et de prévenir les actes violents.
MAIS, dans ce monde-ci en tout cas, ce ne sont pas du tout les actes égoïstes violents qui sont spécifiquement condamnés mais la confusion rêve/Réalité est dite pathologique, dangereuse, "débile" dans l'incapacité à discerner le Réel. Les croyants fervents refusant la question du rêve interdisent aux esprits libres de poser la question, de montrer son insolubilité. Avec punition psychiatrique, lavage de cerveau aux "médicaments" (en fait débilitants faisant rejoindre la débilité dominante).
En système totalitaire, proscrivant la liberté de penser, de douter, ce serait cohérent, mais dans un monde prétendant à la liberté de pensée (sans violence), c'est une auto-contradiction criante. Condamner sa dénonciation, sévir contre les esprits décelant le problème est simplement malhonnête.
Invoquer le "risque" d'actes affreux est un artifice rhétorique, car l'hypothèse du rêve ne conduit que certains individus à la violence et ni plus ni moins que l'hypothèse de réalité. Les pires monstres décrits en ce monde étaient des réalistes (préméditant des horreurs ou organisant leur réalisation jour après jour) et cela n'autorise aucun amalgame, dans un sens comme dans l'autre. Si le débat était honnête, ce qu'il n'est pas, il est interdit.
c)
L'intolérance historico-religieuse
Au problème psychiatrique s'ajoute en France un problème spécifique: la Loi Gayssot. Il est formellement interdit, sous peine de prison et très lourde amende, de douter de l'existence de la Shoah, extermination des Juifs en 1939-45. L'hypothèse que ce monde constitue un rêve est donc punissable comme criminelle, et la justification invoquée est la prévention des haines racistes génocidaires.
Là encore, la confusion est totale entre une pratique du doute qui est imparable et un projet d'action criminelle n'ayant aucun rapport. Ce qui conduit à punir des innocents sous prétexte de protéger des innocents. Qu'un monstre ait ou non mangé des enfants à la sauce tomate, il convient de l'interdire, et prétendre que ceux qui doutent de la véracité de ce récit s'apprêtent à commettre cette horreur tient de la confusion mentale.
Le fait d'insulter des victimes en doutant de leurs martyrs est un autre "argument", mais toutes les religions pourraient imposer leurs dogmes en arguant que les contester insulterait leurs martyres. Que le génocide soit formellement interdit est légitime, mais la condamnation à l'égard de non-violents septiques constitue de la pure intolérance, un abus de position dominante. Bien sûr, les Historiens ont des tonnes de "preuves", des témoins témoignent, mais si les judéo-chrétiens n'imposaient pas leurs standards au monde, les bouddhistes indiens seraient autorisés à formuler leur imparable maxime "tout est illusion".
La loi Gayssot n'est pas honnête mais pas forcément dénuée de logique :
1/ La Shoah est la principale "justification" de la réparation constituée par la re-création d'Israël (oubliant que ce sont des Européens et non des Arabes qui ont commis le génocide), et il est donc capital pour les sionistes que la Shoah constitue une base totalement indiscutable.
2/ Le prosémitisme explicite entraîne l'antisémitisme par réaction (impopularité du privilège), et cela dissuade les mariages mixtes dissolvant l'identité judaïque, pour les Israélites sionistes n'ayant pas émigré vers Israël (restant pour contrôler les grandes puissances occidentales dominant le monde? pour drainer les finances des pays riches?).
3/ Poser l'antisémitisme génocidaire comme base obligatoire permet de "justifier" la lutte "contre le racisme et l'antisémitisme", c'est à dire "contre le racisme sauf le prosémitisme puisque le dénoncer serait (une amorce possible) de l'antisémitisme".
Ce qui est illogique, et clair pour mon personnage de bâtard sémite circoncis mais sans religion, c'est qu'il est interdit de prévenir une nouvelle Shoah par une démarche alternative, évitant le racisme:
1/ Encourager les mariages mixtes dissolvant l'identité juive dans un métissage universel (faisant un jour de tous les humains les descendants d'Abraham, en un sens).
2/ Exprimer une version humaniste de la religion juive, considérant que le Seigneur s'est penché spécialement autrefois sur un groupe d'esclaves en fuite d'Egypte, sans que cela traduise une quelconque préférence éternelle pour leur lignée consanguine, au contraire même si les descendants deviennent semi-esclavagistes en exploitant le labeur de peine des autres peuples, empêchés de protester.
3/ Encourager à changer les traditions familiales de la finance/parole vers l'humble travail de peine, au risque de l'inconfort matériel, pour prouver fausses les accusations de caste d'exploiteurs et dominateurs.
Ce serait peut-être surhumain, mais le proposer n'est en rien une ébauche de projet génocidaire, c'est au contraire une tentative d'innocenter la race juive en dénonçant spécifiquement le comportement prosémite générateur de haine en retour.
d)
L'universalité prétendue
L'hostilité aux dominations financières et militaires pourrait me rapprocher des thèses alter-mondialistes, mais celles-ci se battent pour faire condamner toute mise en cause des Droits de L'Homme. Or l'article premier de cette déclaration prétendûment universelle interdit, sans argument, l'hypothèse du rêve (et le bouddhisme indien).
Selon une logique d'intolérance absolue, l'article qui proclame le droit à la liberté d'opinion n'est déclaré applicable qu'aux indivisus ayant approuvé l'article premier, autrement dit: la tolérance n'existe qu'en aval de l'acceptation de commandements arbitraires. Et cette liberté d'opinion, limitée aux moutons disciplinés s'abstenant de démontrer invalide le dogme, est déclarée universelle, ce qui incarne la malhonnêteté absolue de ce monde.
III/ Incohérence personnelle
Dénonçant les contradictions usuelles ou officielles, les malhonnêtetés déguisées, je ne prétends aucunement à la perfection, à l'équilibre. Même si la plupart des attaques reçues sont déloyales, fondées sur des jeux de mots et amalgames, l'auto-critique paraît saine.
a)
L'amour
Mon antiracisme (ou non-racisme, selon ce qui est mis sous le terme "antiracisme") paraissait cohérent avec mes tendres sentiments envers une vietnamienne, puis une juive polonaise, puis une philippine. Mais alors que la solitude, déchiré, autorise toutes les constructions intellectuelles, librement, un mariage harmonieux oblige à composer avec les valeurs de l'autre (ou les référents du personnage préféré, en lecture onirique). Ma femme adorée joue assidûment au Loto, est patriote, très attachée à sa famille toute entière, approuve l'Eglise catholique qui promet qu'aller à la messe efface les pêchés, rêve d'enrichissement commercial, m'a choisi en tant que riche occidental…
Mettre en accord mes pensées abstraites et ma vie serait la perdre, vraisemblablement, même si ce serait marcher sur les pas de Jésus-Christ, en mieux (sans même la carotte du Paradis post-mortem)… Je ne le fais pas: mon cœur passe avant mon intellect. Egoïstement, c'est clair.
b)
L'inconfort
Certains illuminés montrent l'exemple d'un renoncement aux privilèges en allant partager la misère des pauvres, l'inconfort matériel aigu, la famine éventuellement, les cadences infernales payées misérablement. C'est beau, mais ce n'est pas ce que je fais. J'approuverais simplement une chute drastique de notre niveau de vie occidental jusqu'à équilibre avec les travailleurs asiatiques, leur sort étant à peine amélioré par le partage, du fait du nombre. Je désapprouve le système, je ne vote pas pour son maintien mais j'en profite quelque peu, tant qu'il dure.
Je n'ai effectué en ce sens pratique qu'une moitié du chemin, renonçant au haut salaire que me promettait ma scolarité très brillante, refusant le salaire intermédiaire que m'aurait valu la promotion professionnelle au mérite. Je reste sciemment au bas de l'échelle sociale. Mais je reste en Occident, demeurant injustement privilégié à l'échelle planétaire. Et si j'ai renoncé à une grande carrière, c'était par amour envers la dernière de la classe au lycée, pour tenter de me rapprocher d'elle, aucunement par conviction morale, au départ.
Il m'arrive d'acheter le superflu, tel qu'un petit gâteau par gourmandise, quand cette somme pourrait vacciner un enfant africain. De même, je comprends que la beauté altruiste se retrouve dans des gestes comme le don du sang, mais je ne donne pas mon sang, je crains plus la douleur physique que je n'apprécie le sentiment de faire le bien. Tous les personnages humains ont une dose d'égoïsme, moi aussi, il se trouve simplement que je suis outré par le mensonge, la guerre sale.
c)
L'inutilité
Il est bien inutile de passer tant de temps à réfléchir, écrire, si le prochain réveil conduit n'importe où, potentiellement ailleurs, durablement. Ne pas croire en l'hypothèse de Réalité, même sans la juger assurément fausse, devrait conduire à une forme de je-m'en-foutisme universel, cherchant l'équilibre dans le quotidien, à courte vue. Je perçois que c'est la voie de la sagesse, mais les injustices psychiatrique et prosémite, totalement passées sous silence par les prétendus détenteurs de l'intelligence, me rendent ce monde difficilement supportable. Et je me sens soulagé de mettre par écrit, ordonner, la logique sous-tendant mon malaise. Non pour être efficace et changer les choses, simplement pour un confort intellectuel temporaire, même inutile.
Par ailleurs, l'agnosticisme et la prudence conduisent à envisager vraie cette potentielle Réalité présente, et un mode paresseux de la pensée conduit souvent à s'y laisser guider par les sollicitations et régularités apparentes. Le plus souvent, la contestation n'est même pas envisagée, les questions ne se posant pas. Et si ce mode de fonctionnement était plus courant (les psychotropes sont prescrits pour ça…), tout cela n'aurait effectivement aucune importance pour moi.
d)
Statut arbitraire de la logique
La logique n'est en rien une valeur sacrée, divine, incontestable, à imposer aux autres personnages de ce monde sous peine de sanctions graves. La non-contradiction n'est qu'une saveur du raisonnement me satisfaisant.
Je trouve simplement "très déplaisant", "malhonnête", de voire des personnages faire le contraire de ce qu'ils prétendent faire, prétendre au respect identique de chacun tout en interdisant aux autres ce qu'ils s'autorisent à faire, exigeant des autres ce dont ils se dispensent. Ou plus exactement: j'ai conscience que cela conduit à la guerre, à l'horreur, et je préfère l'équité, la paix.
Ce n'est qu'un choix personnel, pas une leçon prosélyte. Mais c'est un plaidoyer face aux accusateurs aveugles, un rôle de victime punie à tort, dans le rêve ou réel de ce monde...
Conclusion
Prétendre à la vertu altruiste pure me paraît intellectuellement malhonnête. Il n'y a qu'un aménagement du fond égoïste qui paraisse possible.
Personnellement, je serais favorable à la suppression des frontières, la monnaie mondiale unique, la non-transmission familiale de propriété, la liberté d'opinion sans violence physique (le non-réalisme bouddhiste ou autre étant inclus). La voie dominante en ce monde paraît elle fondée sur une aristocratie déguisée en démocratie, en faveur des familles sionistes surtout, occidentales plus généralement – avec menace militaire de destruction massive/nucléaire des opposants, même majoritaires sur Terre. N'ayant pas l'esprit de famille, ne partageant pas le voeu d'opulence, je me sens moins moche que cela, même si je ne suis pas parfait.
Un des points les plus choquants intellectuellement est que les divers compromis moraux ou politiques pouvant être choisis ne sont pas exposables honnêtement, des amalgames absurdes (avec plein appui "intellectuel" prétendant à l'intelligence) conduisant à interdire certaines réflexions, punies de prison ou au mieux: d'asile psychiatrique. Dans une société occidentale qui hurlait au scandale quand cela se pratiquait en Union Soviétique. Là, la malhonnêteté intellectuelle est criante.